Batman n'avait encore une fois rien dit durant le discours de la femme-enfant. Calme, sur ses gardes cependant, il avait apprécié de la découvrir dans de "bonnes dispositions" - dans le sens où elle ne se jetait pas sur lui. Apparemment, elle semblait vraiment prête à accomplir des efforts pour accepter ses règles et renoncer, sûrement temporairement, à ses pulsions de violence. Il était satisfait, mais intérieurement se demandait quand même si ses méthodes seraient suffisantes. La Biosyn semblait monstrueuse, incontrôlable et meurtrière : parviendrait-il réellement à les stopper en ne recourant pas à l'extrême violence prônée par Pandora et... Azrael ?

Depuis sa dispute avec Jean-Paul, il était resté dans ses tranchées, dans ses fameuses règles qui avaient une telle importance pour lui. Convaincu de sa bonne foi, il n'avait jamais remis en question ses théories parce qu'elles lui avaient permis de protéger Gotham City pendant plus de dix années - mais elles commençaient à trouver leurs limites.
En effet, Valley avait réussi à stopper Sonatine en l'assassinant, et Bruce savait que le monstre n'aurait pu être arrêté autrement. Pire encore, après les crimes commis par ce psychopathe issu de la Biosyn et des troupes d'Hécate, il avait lui-même compris pourquoi son ancien bras droit s'était laissé aller à une telle colère, à une telle rage... idem pour le sort du NKVDemon. Si celui-ci n'était pas mort, aux dernières nouvelles, son ancien remplaçant avait été d'une brutalité exceptionnelle en s'en prenant à lui. Comment ne pas le comprendre, après ce que ce monstre avait fait aux Ossavillois ?

C'était compréhensible... mais ce n'était pas acceptable. Selon ses règles.
Les mêmes qui l'avaient conduit à échouer face à Sharp, face à Killer Croc et qui l'empêchaient de retrouver sa place dans cette ville.

Wayne n'aimait pas penser de cette façon, mais il supportait encore moins le goût si réel et fondé de ses réflexions. Il décida cependant de passer outre, pour le moment du moins. Il s'adressa finalement à Pandora, après un long moment de silence suivant les derniers mots de la femme-enfant.

"Je ne crains pas les luttes perdues d'avance, Pandora. Je mène depuis dix ans pour sauver une ville corrompue qui vient d'accepter, ces derniers mois, un camp de concentration et la présence de milices ultra-violentes dans ses rues - mais je ne perds pas espoir. La Biosyn est un adversaire de taille, mais il y en a eu d'autres... et il y en aura d'autres."

Son ton était calme, à nouveau sympathique. Il n'oubliait rien des crimes et abus de la femme-enfant, mais savait maintenant passer au-delà pour parvenir à ses buts. La situation était trop grave, trop importante pour qu'il puisse demeurer seul et solitaire... malheureusement, il avait besoin d'elle et devait donc accepter quelques sacrifices. Comme elle.

"Dis-moi tout, maintenant."

Calmement, le Chevalier Noir s'approcha et appuya sur quelques boutons du caisson. Lentement, la machine se referma, se rétracta et disparut dans la structure elle-même de la Batcave. Il fit quelques pas encore sur le côté, et sortit d'un coin sombre une canne, qu'il lança à la volée vers Pandora.

"Tu marcheras mieux avec."

La canne était rétractable et calibrée pour une petite taille. Un geste d'ouverture, à nouveau - il espérait ne pas le regretter.

"Non."

Batman fut soudainement au-dessus de la femme-enfant, désormais allongée sur le sol, pleurant malgré sa volonté farouche de ne pas lui montrer ses faiblesses. Il était respectueux de sa fierté et de son égo, mais il ne pouvait la laisser dans un tel état. Il s'accroupit à côté d'elle, passant ses bras derrière sa nuque et ses genoux.

"C'est faux, Pandora."

Calmement, sans effort, il la souleva et fit lentement claquer ses bottes sur la structure métallique sous eux. Sa voix prit alors un ton plus sec, plus autoritaire alors qu'elle avait été avant extrêmement douce.

"Ordinateur : lit de repos."

Quelques secondes plus tard, la structure s'ouvrit et libéra une longue table métallique recouverte d'un petit matelas et d'un coussin. Avec précaution, il déposa la femme-enfant dessus et plaça ensuite ses mains sur le rebord du lit. Il sentait qu'elle était de bonne foi en acceptant leur alliance, mais il ne pouvait oublier leur affrontement et le danger qu'elle représentait. Il ne pourrait jamais lui faire totalement confiance, et ne pouvait se permettre de la sous-estimer.

"Ton récit est... troublant. Je n'ose imaginer réellement ce que tu as ressenti face à ces horreurs, et ta réaction fut alors... compréhensible - et inacceptable. Je ne peux te laisser te venger de ceux qui t'ont fait du mal : ce ne sont pas mes règles, et ce n'est pas ma façon d'agir. Ceux qui doivent être punis le seront par la Loi et la Justice, c'est tout ce que je peux te promettre. Je ferai cependant tout ce qui est en mon pouvoir pour qu'ils souffrent... et que ta propre douleur s'achève."

Le Chevalier Noir savait que Pandora n'accepterait pas sa décision, mais il était bien décidé à l'imposer. En écoutant son histoire et ses souffrances, il avait réellement compris pourquoi elle avait agi de la sorte lors de leur première rencontre. Cependant, si elle avait des circonstances atténuantes, elle demeurait responsable de crimes et d'abominations qui n'étaient pas excusables simplement par le poids de son passé. Elle avait eu l'opportunité d'adopter d'autres méthodes, de se faire aider, elle n'avait pas su ou pu y parvenir. Elle devait maintenant faire face aux conséquences de ses actes et abandonner ses idées de revanche si elle voulait vraiment son aide.
Dès que la Biosyn serait tombée, il se chargerait lui-même de fournir à Pandora la punition adaptée à ses crimes. Elle n'avait guère sa place dans une prison, mais il savait déjà comment elle pourrait racheter ses crimes.

"Ta vie t'a été volée... mais je peux t'en offrir une autre. Durant ta semaine d'inconscience, mes appareils t'ont soigné mais aussi analysé ton corps, ton génome et tes besoins. Je ne pourrais jamais te modifier comme la Biosyn l'a fait : je n'ai pas accès à ses méthodes et je me refuse de les adopter. Cependant... j'ai découvert en quoi la chair humaine t'est indispensable. J'ai découvert quels sont les éléments chimiques nécessaires à ta survie qui sont présents dans la chair humaine. Et je peux les fabriquer, les incorporer dans un autre type de nourriture."

Bruce poussa un long soupir. Il avait eu accès à ces informations dès le réveil de Pandora, mais il avait attendu de découvrir son récit, son passé. Il voulait également savoir si elle acceptait de faire des concessions pour parvenir à leurs objectifs, et il en était satisfait. Il pouvait lui donner cette unique chance - elle la méritait.

"Tu n'aurais plus à te nourrir de chair humaine, mais du produit similaire et artificiel que je te fournirais. Il m'est également possible de travailler sur le vieillissement de ton corps, pour soit débloquer ce que la Biosyn t'a fait, soit te faire grandir en un bloc, et ce régulièrement, pour te donner une apparence en phase avec ton âge réel. Qu'en dis-tu ?"

Le deuxième traitement serait plus compliqué, mais les récentes découvertes en matière de lutte contre la Progéria des Entreprises Wayne lui permettraient d'essayer quelques protocoles de soins qui avaient de grandes chances d'aboutir. Même s'il l'utilisait peu, Wayne avait une grande connaissance en chimie et en génétique, et se sentait capable d'aider la femme-enfant, surtout avec l'appui des équipes de Lucius Fox.
A Pandora maintenant de voir ce qui valait le plus pour elle : sa vengeance ou la possibilité de redevenir presque humaine. Sa réponse déterminerait beaucoup d'événements à venir.

"Je vais t'aider."

Batman baissa son regard sur Pandora et... grimaça un sourire. Fugace, mal à l'aise, mais il avait cependant fait le geste et ne le regrettait pas. Même si elle était responsable d'horreurs et d'abominations, même si elle méritait d'être punie, la femme-enfant demeurait avant tout une victime de ce que la Biosyn lui avait fait subir. Et elle devait bénéficier d'une deuxième chance pour pouvoir vraiment avoir l'opportunité de changer et d'adopter une vie plus "normale". Son existence ne la serait jamais réellement, mais elle pourrait être plus en paix avec elle-même et le monde - et peut-être réapprendre à être la femme qu'elle avait cessé d'être pour devenir le monstre qu'il avait dû affronter.

"Le traitement sur le vieillissement de ton corps doit encore être analysé et programmé, mais mes systèmes ont pu clairement analyser ton génétisme et peuvent préparer de la nourriture adaptée à ton état et tes besoins."

Lentement, il s'approcha d'une des consoles de la Batcave, appuya sur quelques boutons et regarda les résultats sur un écran. Quelques bips plus tard, il lut ce qui l'intéressait et se retourna vers la femme-enfant. Son visage demeurait grave et neutre.

"La production a été lancée dans un laboratoire. Dans quelques heures, tu auras ta première... ration. Ou ton premier repas, si tu préfères."

Il disait vrai : la semaine que Pandora avait passée ici avait été amplement suffisante pour permettre aux systèmes de découvrir ses besoins et de prévoir une solution de remplacement à la chair humaine. S'il n'avait pas lancé immédiatement la production, il savait qu'elle ne serait pas longue à être achevée - mais pas ici. La Batprison n'était pas assez équipée pour de tels produits, et il préférait de toute façon éviter de laisser à d'éventuels évadés le loisir d'utiliser des instruments aussi sophistiqués.

"Pandora... tu as fait un grand pas en me demandant de t'aider et en acceptant tes fautes. Tu as besoin d'aide et je peux t'en fournir si tu me soutiens dans ma lutte contre la Biosyn - avec mes règles, encore une fois. Pour la suite, je t'indiquerai clairement comment tu rembourseras ta dette envers moi, mais surtout envers la société pour tes crimes. Je... ne considère pas que ta place soit dans une prison ou un institut classique. Tu as droit à une deuxième chance, mais tu mérites une peine équitable. Nous verrons comment gérer cela quand la Biosyn sera tombée."

Le Chevalier Noir fit claquer ses bottes sur la structure métallique et se rapprocha de la femme-enfant.

"C'est à prendre ou à laisser."

Si sa voix avait été douce et sympathique auparavant - pour Bruce, évidemment -, son ton était devenu plus sec et autoritaire. Il se devait de lui rappeler que rien n'était effacé, malgré la main tendue.

Batman avait écouté avec intérêt les paroles et informations délivrées par Pandora. La Batcave enregistrait déjà tout, mais il tenait à rester concentré sur ce qu'elle pouvait lui dire. En se retournant pour la fixer, il avait bien remarqué qu'elle était en proie à une crise qu'elle gérait difficilement et contre laquelle il ne pouvait rien faire - ou ne voulait rien faire pour le moment. S'il était déterminé à l'aide et à la soulager, il devait avant tout découvrir le maximum d'éléments sur la Biosyn et la femme-enfant demeurait sa seule source de renseignements pour le moment. Même s'il n'appréciait guère de la laisser souffrir, il la laisserait aller jusqu'au bout de son inconscience et de sa crise, quoi qu'il leur en coûte.

Alors que Pandora se mettait désormais à se tordre de douleur et à hurler la Faim qui la dévorait, il décida cependant d'agir et de mettre fin à son épreuve. Elle n'était plus capable de lui fournir d'autres informations, et risquait de devenir trop dangereuse s'il la laissait subir encore trop longtemps ses besoins. Ses yeux blanchâtres plissèrent en la fixant, et il s'avança en faisant claquer ses bottes sur la structure métallique, pour les quelques mètres qui les séparaient à peine.

"Tu n'as plus à souffrir autant."

Le Chevalier Noir ne voulait pas poser la main sur elle, il ne voulait pas provoquer sa crise et sa fureur. Il l'observa longuement, réfléchissant à ce qu'il pouvait faire pour elle. Il ne pouvait pas la laisser ainsi, mais ne voulait pas la remettre dans le caisson : de tels séjours seraient potentiellement violents et capables de dérégler son système interne, qui était déjà bien trop massacré par les actes monstrueux de la Biosyn... il ne pouvait pas lui offrir un tel cauchemar.

"Il y a une solution."

Il ne voulait pas en arriver là, car cela aurait montré à la femme-enfant à quelle technologie il avait accès. Si elle voulait changer, il se méfiait encore de ses capacités et de ses fureurs. Cependant, elle souffrait maintenant beaucoup, et c'était trop cruel, même pour lui, de la laisser dans un tel état.
Bruce se tourna alors et s'approcha d'une autre console, plus petite, décalée sur la gauche, presque insignifiante au premier regard. Il poussa quelques boutons, et tout l'appareil se mit soudainement à bourdonner et à luire. Une lumière étrange, jaune vif, apparut juste au-dessus de lui. Pendant quelques secondes, elle fut si forte qu'il dut plisser ses yeux pour la supporter, avant que tout ne s'arrête en un instant. Et il y avait quelque chose sur la console, là où il n'y avait rien auparavant.

Il s'empara de l'objet, un bocal long et en acier, et s'approcha à nouveau de Pandora. En chemin, il ouvrit le couvercle du bocal et le tendit à la femme-enfant. Son visage était neutre, sa voix inexpressive, mais intérieurement il s'attendait à ce qu'elle apprécie le geste.

"Ce n'est que le premier test, la première production... le visuel doit être retravaillé, le goût sera sûrement différent, mais cela apaisera... ta Faim."

A l'intérieur du bocal, Pandora découvrirait une masse informe, rosâtre et peu ragoutante. Wayne se tut alors, laissant à la femme-enfant le soin de comprendre réellement ce que c'était, et ce que ça voulait dire pour elle - et pour eux. Il tenait parole, plus vite qu'il ne le pensait, mais la situation ne lui avait pas laissé le choix. Il avait dû user d'un téléporteur ancien, plus petit que les autres, pour faire venir rapidement la dose que la femme-enfant devait ingérer. Il avait fait un pari en agissant ainsi, à elle de lui prouver maintenant et plus tard qu'il avait eu raison.

Pandora s'endormit après avoir dévoré la bouillie téléportée quelques instants plus tôt. Durant toute la "dégustation", Batman l'avait fixé en silence. Le visage d'une neutralité extrême, d'un calme olympien, il était demeuré sur ses gardes au cas où le goût ne serait pas adéquat pour elle, au cas où la formule n'était pas entièrement au point. Déjà peu doué avec les émotions en temps normal, c'était évidemment pire face à une ennemie éventuelle, voire une alliée éventuelle. La femme-enfant méritait cette deuxième chance, mais il ne pouvait pas encore lui faire entièrement confiance.

En regardant le corps endormi et exténué devant lui, le Chevalier Noir poussa un long soupir : cela allait être dur et compliqué, par la suite. Même si elle acceptait ses conditions, il savait qu'elle aurait à faire des choix insupportables et inhumains. Son envie, son besoin de vengeance était légitime, mais inacceptable. Malgré ses paroles actuelles, pourrait-elle tenir le même discours devant eux ? Miss White ? Keen ? Et tous les autres ?
Il en doutait, et il était peiné de devoir, déjà, imaginer des solutions pour la mettre hors d'état de nuire.

A l'intérieur de sa "nourriture" était déjà glissée des éléments ferreux, microscopiques, que la nano-technologie qu'ils contenaient assembleraient pour former un récepteur et un appareil électrique. A distance, il pourrait alors enclencher l'électrocution de Pandora si la situation le demandait. Il espérait que ce ne serait pas le cas - mais savait déjà qu'il devrait quand même le faire.

Avec une douceur étonnante, il posa les bras de la femme-enfant sur elle, arrangea ses jambes et l'allongea du mieux possible. Il décala la structure métallique sur un côté de la plateforme, avant de se diriger vers plusieurs consoles. Bloquant et protégeant tous ses appareils, les rendant impropres à toute utilisation sans mode de passe et recouverts de sécurités pour empêcher leur destruction, il mit également en place la téléportation des "doses" de Pandora à heures fixes, trois fois par jour. Elle aurait suffisamment pour tenir et aller mieux, espérait-il.
Enfin, Bruce alluma un écran et laissa un mot à son "invitée" : "Fait télévision et ordinateur. Bloqué et surveillé constamment. Tu peux voir les nouvelles et les programmes nationaux et classiques, mais pas de courriers ou d'éléments trop violents. Je te suivrai. Bon séjour".

Une fois tout ceci installé, il disparut alors par son entrée secrète et indétectable, pour rejoindre son véhicule et retrouver Gotham City. Maintenant qu'il était entier, fort, et sûr de lui, il était temps de passer au réel adversaire, à la réelle cible de sa croisade - il était temps de passer à Quincy Sharp.

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A SUIVRE

:arrow: Rising of the Penguin.

A une heure du matin, la Batmobile n'hésitait pas à foncer encore plus vite que d'habitude sur le périphérique de Gotham City pour rejoindre un des tunnels mystérieux et inconnus empruntés par son propriétaire pour rejoindre aisément Arkham City. Construits du temps de la guerre de Sécession et des combats sans merci entre Américains qui se déroulaient dans la région, ils avaient été gardés secrets par la famille Wayne, toujours consciente qu'un tel atout pourrait être utile aux générations à venir. Bruce était maintenant à la tête d'une connaissance pointue sur les différents réseaux sous-terrains de la région, et en usait pour parvenir plus aisément à ses fins.

Il déboucha ainsi en quelques instants près de l'ancienne maison de James Gordon, garant et cachant son véhicule en lieu sûr pour rejoindre discrètement et au pas de course l'entrée secrète de la Batprison officielle d'Arkham City. Après avoir subi les examens nécessaires, il vit enfin s'ouvrir l'énorme porte de métal devant lui, lui permettant de pénétrer dans la caverne de roche et d'acier qu'il avait fait construire ici aux débuts de la ville-prison.
A l'époque, il avait cru faire de l'excès de zèle en prévoyant tellement d'annexes de sa Batcave ici, persuadé de régler rapidement cette situation ; il se rendait maintenant compte à quel point il avait été naïf et stupide.

"Pandora."

Sa voix était calme mais autoritaire. Descendant calmement les marches en métal qui menaient au centre de la structure, le Chevalier Noir plissait les yeux pour trouver où la femme-enfant pouvait se cacher. Selon les relevés, elle dormait, mangeait et évoluait normalement ici, mais il ne voulait se reposer sur aucun acquis. Il venait de passer cinq jours à lutter, psychologiquement, contre Quincy Sharp/Amadeus Arkham, et était fatigué. Les menaces du Pingouin étaient déjà de trop, il ne pouvait alors se permettre un excès de confiance éventuellement fatal.

Evidemment, Wayne n'avait pas eu le temps de se changer et continuait de porter le "costume" créé sous les ordres de Quincy/Amadeus, pour que celui-ci soit persuadé de sa victoire. Il n'appréciait bien sûr pas ces nouvelles couleurs, mais voulait les conserver quelques temps pour que Sharp/Arkham ne soit pas alerté par ses hommes de son échec une fois qu'il serait sorti. Toute cette histoire était une affaire de manipulation depuis le début, et il était temps qu'il montre ce qu'il pouvait faire.

Batman s'arrêta au milieu de la plateforme, attendant l'arrivée de Pandora - sur ses gardes, évidemment. Certains réflexes avaient et devaient avoir la vie dure.

Batman n'appréciait que très rarement l'humour. Et il goûtait encore moins l'ironie, la moquerie et les railleries - spécialement sur sa personne.
Son regard se fixa sur la fine silhouette qui apparaissaient, qui sortaient des ombres dans un mince vêtement noir. En temps normal, il se serait demeuré muet et aurait laissé s'installer une tension sourde entre eux, pour la mettre mal à l'aise ; en temps normal, il aurait fait comprendre à Pandora combien sa réflexion avait été malvenue et inutile.

Mais ce n'était pas un temps normal.
Un mince sourire apparut, étonnamment, sur le visage du Chevalier Pourpre, Rouge et Jaune tandis qu'il s'approchait lentement de la femme-enfant. Ses pas claquaient sur le sol métallique de la plateforme avant de se stopper devant elle.

"La ville devient folle. Je m'adapte."

Deux phrases, quelques mots pour simplifier l'enfer que vivaient Gotham City et Arkham City - et qu'il vivait lui-même. Ces derniers jours, passés à subir la lutte violente qu'il avait démarré avec Quincy Sharp/Amadeus Arkham, avaient été éprouvants et la perspective d'un affrontement brutal avec Oswald Cobblepott n'avait rien d'intéressant. Cependant, il ne pouvait laisser le peuple subir la menace du Pingouin - et avait donc fait l'effort de rejoindre la Batprison pour informer la femme-enfant de la situation.

"Oswald Cobblepott a piraté les communications des deux villes il y a quelques minutes. Il a posé plusieurs bombes dans plusieurs douanes, et mis en place plusieurs caméras pour se protéger dans le Bowery. Il propose aux villes de ne pas faire exploser les bombes si la population... te livre à lui. Il te veut. Pourquoi ?"

Le ton, plus doux auparavant, s'était transformé. Plus dur, plus sec, plus autoritaire... plus Batman, tout simplement.

"Vous n'avez aucun lien. Vous ne vous êtes que croisés. Vous n'avez pas eu de véritable affrontement. Cobblepott n'a aucune raison de te vouloir, surtout après les évènements orchestrés par Sonatine. Pourquoi, Pandora ? Pourquoi voudrait-il t'avoir alors qu'il n'a à y gagner que la haine de la Biosyn ?"

Ses yeux se plissèrent tandis que Bruce comprenait réellement ce qu'il se passait.

"A moins que la Biosyn le manipule... ?"

A elle maintenant de finir le chemin.
A elle maintenant de révéler le mystère.

"Alors elles tomberont."

Son ton avait été autoritaire, sa voix dénuée de tout doute. Batman avait observé avec intérêt les troubles de Pandora pendant qu'elle comprenait ce qu'il se passait ; il en avait été satisfait.
Comme il l'avait prévu, elle avait rapidement saisi la portée des informations qu'il lui livrait, mais il avait été à moitié surpris de la découvrir aussi rageuse à l'idée que certains innocents puissent mourir par sa faute. Lui qui continuait de se méfier d'elle, à raison d'ailleurs vu son historique et son potentiel, appréciait de voir combien la femme-enfant était plus complexe. Elle semblait vraiment vouloir s'en sortir et s'amender - c'était positif pour la poursuite des plans qu'il avait pour elle.

"Pandora... tu n'es plus seule face à la Biosyn."

Il fit claquer ses bottes sur la structure métallique et s'accroupit devant elle, déjà assise. Il posa une main réconfortante et "gentille" sur l'épaule de la femme-enfant. Leur relation commençait à réellement changer, lui ayant de plus en plus une certaine... sympathie pour elle. Pandora avait grandement souffert dans son existence, elle avait été littéralement sacrifiée et n'était pas responsable de tous ses actes - uniquement des plus récents.
En ce sens, elle méritait une deuxième chance. Et semblait se battre suffisamment dans l'espoir de la mériter pour gagner peu à peu son respect.

"Je vais t'aider. Cobblepott te veut - et nous allons lui donner ce qu'il veut. Nous allons lui offrir ce que la Biosyn attend de lui : tu vas aller au repaire du Pingouin."

Son regard blanchâtre était fixé dans les yeux de Pandora, tentant de lire en elle pour voir comment elle réagirait face à ces affirmations. Même s'il était clair qu'elle brûlait d'aller régler le cas d'Oswald et de ses ennemis, elle n'aurait peut-être pas imaginé que lui-même propose une telle solution.

"Je serai là et je te sortirai de là. Et nous réglerons les cas de Cobblepott et de la Biosyn - je te le promets."

Le Chevalier Rouge, Jaune et Pourpre esquissa un mince sourire pour accompagner ses sourires, pour aider et rassurer la femme-enfant. A voir si ça fonctionnerait.

Batman poussa un long soupir. Le moment était difficile.
Devant lui, Pandora se laissait aller, laissait couler toutes ses émotions sans y mettre aucune limite. Elle retrouvait en elle la petite fille triste, mais parlait comme la femme qu'elle était devenue en accumulant les épreuves, les souffrances et les drames. Elle avait vécu des horreurs, avait subi la douleur et la mort, les avait dispensés mais... elle voulait changer. Et elle était encore harcelée par son ancienne vie, comme un fantôme qui refusait de cesser de la hanter.

"Oswald Cobblepott est avant tout un homme d'affaires et un meneur d'hommes. S'il a d'étonnantes capacités physiques, il n'est pas un véritable combattant - normalement. Cependant, d'étranges rumeurs commencent à circuler dans les deux villes sur lui, rumeurs qui concernent son potentiel guerrier qui aurait évolué dernièrement pour des raisons encore inconnues. Si tu veux et si tu dois le combattre, il te faut des armes - mes armes."

Il se releva lentement et s'approcha d'un des placards de la structure métallique, un de ceux proches de la marque du poing de la femme-enfant au mur, qu'il avait évidemment découvert en rentrant ici ; il avait fait le choix de ne rien dire, par respect pour ses douleurs. Ce serait la seule fois qu'il ferait preuve d'une telle ouverture d'esprit.

"Tu ne peux affronter le Pingouin ainsi, mais... tu n'es pas Robin, Batgirl ou Nightwing. Tu es toi-mêmes, et ça me semble amplement suffisant."

Le Chevalier Noir ouvrit le placard avec le bon code d'accès, avant d'y chercher quelque chose pendant quelques instants. Il en sortit un long vêtement noir, qu'il envoya avec grâce vers la femme-enfant.

"Mais ça ne veut pas dire que tu n'as pas à porter mes couleurs."

Pandora découvrit alors un costume à sa taille, fait de cuir et de kevlar. Véritable combinaison de combat ultra-résistante, elle était entièrement noire et comportait un symbole sur le torse - une chauve-souris, bien sûr. Il fit glisser ensuite vers elle des bottes et gants dans la même matière, avant de lentement s'approcher. Il tenait entre ses mains une ceinture d'or.

"Ne me déçois pas."

Après une dernière hésitation, Bruce lui tendit la ceinture, contenant des gadgets similaires aux siens : bombes, menottes, batarangs, armes de poing, grappins, masques, etc. Il lui faisait une confiance extraordinaire, à elle de ne pas le tromper et de ne pas s'en refaire un ennemi mortel.

:arrow: Wayne Enterprises.
:arrow: The twisted fate of justice.

La porte principale de la Bat-Prison s'ouvrit après des jours, voire des semaines de quasi silence. Depuis la terrible nuit où Pandora avait affronté Oswald Cobblepott, et où quelques heures après le Batman prenait une terrible décision face à Quincy Sharp, il n'avait pas eu l'occasion de reprendre réellement contact avec la jeune femme. Il savait qu'elle avait été informée de son choix, car il tenait à ce qu'elle se tienne informée de l'actualité ; en un sens, il n'avait pas voulu revenir pour éviter son regard et ses questions.

Accompagné par Azrael, le Chevalier Noir propulsa vers le centre de la Bat-Prison le corps inconscient de Perséphone, boostée encore par les médicaments qui lui avaient été injectés auparavant.
Calmement, il descendit les marches, fixant d'un oeil noir la forme immobile jetée sans ménagement à l'intérieur de la structure. Vêtu d'un costume classique, avec le symbole noir sur fond jaune, il avait troqué son étonnante combinaison de la fameuse nuit "Quincy Sharp" pour cette deuxième peau qu'il aimait tant.

Arrivé au milieu de la Bat-Prison, Bruce tourna lentement sur lui-même, cherchant du regard la femme-enfant. Même s'il lui faisait relativement confiance, il savait désormais ce qu'elle avait subi et d'où elle venait - et il ne pouvait être entièrement serein en sa présence. Après sa visite à Mallet Island, il avait eu accès à énormément d'informations sur Jennifer Willis, et cela faisait aussi partie des raisons le poussant à mettre de la distance entre eux.

Comment lui faire face en connaissant les secrets de son ascendance ? Ses liens avec Marcus Silberman ? Le destin de sa mère ? Et tout le reste ?
Pandora était coupable de monstruosités, mais elle était victime d'horreurs encore pires. Alors qu'il attendait son arrivée et se préparait, au cas où, à se défendre, Wayne se demandait comment lui annoncer tout ça - et continuer à la maîtriser. Quand tout ceci serait fini, quelque chose se briserait entre eux : cette confiance qu'ils ont tant de mal à arracher l'un de l'autre. Mais si ça permettait de faire tomber la Biosyn... c'était un sacrifice qu'il était prêt à faire. Et il était sûr qu'elle aussi, malheureusement.