Jean-Paul s'était lâchement fait abandonner et par Lulla qui s'était éloignée pour discuter chiffon et sac à mains avec Rachel et ensuite par Bruce qui s'était lui aussi éclipsé pour parler avec Tim. A en juger par le regard sérieux, et les quelques mouvements subtils de main, apparemment ils discutaient de l'adhésion dans les justiciers d'état de l'ancien jeune prodige. Ce devait être une conversation difficile, mais quelque chose disait à Jean-Paul qu'ils ne semblaient pas totalement en froid... Peut être parce que lorsqu'il s'était présenté à lui, Tim ne lui avait pas présenté sa nouvelle situation annonçant au passage les différends qui les opposeraient nécessairement de part ses nouvelles fonctions et qu'ils avaient menés ensemble quelques missions efficaces.
Tim s'éloigna ensuite, et Bruce fut accaparé par une espèce de vieux barbu. Jean-Paul se dirigea vers le bar et commanda un nouveau verre de soda et prit quelques amuses-gueules avant de retourner vers les deux harpies.

"Mesdames, maintenant il suffit. Je ne puis vous laisser propager votre fiel davantage. Je ne suis pas dupe." dit il de manière provocatrice, totalement au hasard, un sourire jusqu'aux oreilles.
Après avoir reçu en pleine face un élan de solidarité féminine destiné à montrer qu'il n'était qu'un stupide mâle, Bruce se joignit à la fête et enlaça sa partenaire tout en balançant quelques piques.

"Et bien, vous faîtes un sacré beau couple. Pour les années 30, mais un sacré beau couple quand même. Bruce, tu penseras à me rendre le costume après, c'est un souvenir de mon grand père, j'aimerai bien le remettre dans sa malle."

Et il répondit aussi à la provocation du playboy.

"Tu as raison, sujet inintéressant. On discutait de Batman, encore une relique du passé. Rachel nous disait justement, qu'elle enviait la femme qui partage le quotidien d'Azrael. Je pense que tu pourrais t'acheter un cosplay, pour pimenter un peu vos soirées." dit il en appuyant ses propos d'un clin d'oeil entendu.

Bien évidemment, tout cela était faux. Et il se prendrait très probablement un retour de manivelle en pleines dents. Mais tant pis, Valley réagissait promptement et sans vraiment réfléchir à ce que Batman pouvait lui mettre dans la face sur ce terrain là.

Rachel s’était éloignée des deux hommes, car la discussion commençait à s’envenimer, et elle craignait qu’ils finissent pas en venir aux mains, même si Bruce lui avait déjà répété que se jeter des piques faisait partie de leurs passe-temps habituels, une sorte de rituel de courtoisie bien cachée.

Elle fut surprise, mais dans le bon sens, lorsque la jolie policière l’attira un peu à l’écart pour entamer une nouvelle discussion, sur un sujet tout à fait différent. Malgré sa réputation de forte tête, elle venait de prouver qu’elle savait ménager la chèvre et le chou, et avait le don de calmer les conflits. Surtout qu’il y en avait des choses à dire sur le nouveau maire !

Je vois que nous sommes d’accord… Maintenant, la solution de New Gotham n’a pas que des mauvais côtés… reste à savoir comment ça va être mis en place… Même nous, au Palais, qui sommes pourtant en première ligne quand il s’agit de justice, ne savons encore rien de ce qui va être mis en place.

A peine une seconde plus tard Azrael surgit dans la discussion des deux jeunes femmes. Rachel sourit, avant de répliquer à sa petite pique.

C’est vrai que vous nous avez donné du grain à moudre ce soir !

Ce fut ensuite le tour de Bruce Wayne de revenir se joindre à la conversation, en rajoutant une couche à leur numéro de play-boy blasés et suffisant.

Tu as raison Bruce, nous discutions d’un sujet totalement intéressant et insipide. Nous parlions de toi. Sauf que, pour vous contredire, Jean-Paul, j’ai souvent vu des attentats à la pudeur commis par des exhibitionnistes en tenue de Batman et pourtant… pas un seul déguisé en Azrael. Peut-être que c’est à vous d’emprunter un de ces costumes pour une de vos soirées…

Ce petit jeu commençait à l'amuser!

Le diable et le maire avaient discuté de longues minutes, en camarade, dans une ambiance légère. La soirée se déroulait à merveille, d'après les quelques "espions" que Shreck avait mêlé à la foule pour prendre la température, la petite sauterie ravissait tout le monde et même les figures connues de l'opposition semblaient ne rien trouver à redire.
Le docteur Hurt s'en amusa quelques instants, et après quelques politesses, il quitta la compagnie du politicien pour regagné le bar et se faire servir un scotch.

Tous ces gens, ces pantins pathétiques endimanchés qui se pavanaient, ces gens de la "haute" qui déambulaient dans la salle, tout cela était d'un mortel ennuie. Simon avait repéré Bruce Wayne, au loin mais ce dernier ne semblait pas l'avoir vu. Il aurait tant aimé s'en rapprocher, que ce dernier vienne le voir, après sa rencontre concluante avec Batman. Mais non, il préférait se distraire avec un autre couple. Peut être cela se finirait il à coup de cravaches et d'échangisme comme à l'ancienne époque des boudoirs feutrés où la bourgeoisie s'adonnait à tous les vices de l'âme : luxure, drogue, boisson.

Le désir de la danse macabre se faisait de plus en plus pressant, pendant quelques instants, les doigts du docteur se crispèrent sur le cristal, et Hurt bu une gorgée amère de son nectar ambré. Non, il fallait se calmer, au pire pourrait il se défouler sur quelques prostituée oubliée dans les basfonds de la ville, la danse macabre devait être répétée, mise en scène pour délivrer le maximum de jouissance.

Finalement, une fois calmé, il rebut une gorgée de scotch et en se retournant, découvrit un visage familier et réjouissant.

" Madame le substitut du procureur, c'est un plaisir de vous voir ici. Comment allez vous ?" demanda-t-il à Rachel Dawes en lui offrant un sourire poli.

Rachel était fatiguée de cette valse de mondanités et surtout d’émotions. Dans la même soirée, elle avait cru perdre l’homme qu’elle aimait en lui avouant qu’elle était enceinte, et venait finalement de s’attacher encore plus profondément à lui, mais ce yoyo brutal entre crainte et soulagement, larmes et joie l’avait épuisée, conjugué au fait qu’elle devait avant tout sauver les apparences. Valley et Wayne se livraient à une joute verbale, se lançant des piques, des allusions à demi-mot, et elle se devait de ne pas perdre la face, tout en ne perdant pas pied. Réfléchir constamment à ses paroles car en une phrase elle pourrait trahir un des plus grands secrets qui régnait sur Gotham, et en même temps mettre en danger l’homme qu’elle aimait, ainsi qu’une grande partie des justiciers qui faisaient régner un semblant d’ordre à Gotham. Il fallait qu’elle prenne l’air, qu’elle s’éloigne de tout ça, au moins pendant quelques minutes, et qu’elle souffle un peu.

Elle laissa dont Bruce, Jean-Paul et Lulla à leur affrontement et se dirigea vers le bar. Elle mourait d’envie d’un bon whisky, sauf qu’elle se rappela à la dernière minute qu’il y avait mieux à faire dans son état, et commanda un grand verre d’eau gazeuse avec une rondelle de citron avec un petit sourire aux lèvres. Elle profita du calme relatif des quelques secondes sans que quiconque ne vienne lui parler, lorsqu’elle remarqua une silhouette s’avancer vers elle, qui lui disait vaguement quelque chose, sans pouvoir précisément mettre un nom dessus. L’inconnu vint poliment lui faire la conversation, et elle l’accueillit avec un sourire. Puis elle se souvint, le fameux psychiatre, bras droit de Shreck. Un panier de crabes, il allait falloir marcher sur des œufs. A nouveau…

Monsieur Hurt… Je suis étonnée de vous voir ici, mais le plaisir est partagé… Je dois avouer que le Palais est en ébullition avec le nouveau maire et tous les changements prévus à New Gotham, ce qui me laisse peu de temps libre je dois l’avouer… Et vous, par trop débordé par ce projet titanesque ? Je sais que Shreck vous y a fait prendre une part importante…

Maximilien Shreck avait vaqué à quelques conversations avec le Docteur Hurt, tout en profitant de ses lumières sur divers éléments de la ville, son adaptation à ses nouvelles charges puis avait du s'en séparer pour profiter d'autres convives, mais aussi et surtout de converser avec le jeune Red Hawk qui l'avait rejoint un peu plus tôt. Ce jeune homme était une aubaine car la jeunesse était facilement manipulable et son apparente proximité avec quelques individus que Shreck voulait surveiller de près en faisait un outil de choix pour quelques missions à la limites de la légalité (du moins celle des autres Hommes).

C'était la première chose à faire pour s'assurer une bonne place dans les affaires, élargir sa conception de moralité, d'éthique et de légalité. Tout ce qui rapporte de l'argent doit être légale, est moral ce qui rapporte beaucoup d'argent, est éthique un sacrifice pour s'assurer une très bonne moralité. Shreck n'avait jamais gardé plus que nécessaire à ses côtés des associés qui ne lui servaient plus ou qui ne désiraient plus s'accorder à la perfection avec son dictionnaire intérieur.

Il se permit de poser sa coupe à demi-vidée sur le plateau d'un serveur qui passait non loin et se rapprocha en compagnie du jeune homme du banquet.

-Mon cher Red Hawk, commença-t-il. Je vois que vous avez quelques bonnes connaissances dans le milieu de Gotham et je ne puis que vous féliciter d'ainsi cultiver un entourage de qualité, cependant, en tant que Maire de Gotham City, je préfèrerais qu'il ne soit fait aucun rapprochement entre vous et ces individus, ce serait potentiellement les mettre en danger vous comprenez, les justiciers protègent leur vie et celle de leur entourage grâce à leur masque, qu'adviendrait-il si ces gens se voient être menacés à cause d'une inconséquence aussi bête? Ce serait la sécurité que nous cherchons à garantir qui serait menacée, tout autant que la viabilité du corps des Justiciers d'État. Je ne dis pas cela pour vous accabler de reproches, cependant et étant donné que nous n'avons pas encore stabilisé tout l'édifice, il serait prudent d'être...prudent. Vous me comprenez naturellement.

Shreck se saisit d'un toast pour la forme, il n'avait pas faim, mais il fallait protéger les apparences, organiser un banquet sans y goûter pouvait être mal perçue par les photographes et les convives. Ce n'est pas non plus que Shreck ne voulait pas être dur envers son subordonné, mais il voulait bien entendu endormir sa vigilance.

-Les temps que vivent Gotham réclament des mesures exceptionnelles et la présence de Justiciers illégaux est l'une des difficultés de notre temps. Cependant je vous laisse y penser, certains de vos amis se sont rapidement opposés aux programmes visant à rétablir l'ordre au sein de la ville ou tout du moins à réduire certains cercles d'influences, il est de notre devoir de bon citoyen d'être vigilant à ce genre de comportements qui pourraient être dangereux pour le pouvoir civique que nous incarnons, et je dis bien "nous", car vous avez fait le choix de soutenir le gouvernement avec un courage dont d'autres ne pourraient pas se vanter.

Shreck mordit à contre-cœur dans son canapé fourré et prit le temps de mâcher un peu en regardant la salle, et surtout le groupe formé de l'ignoble Wayne, du rustre Valley et enfin de cette impertinente Brogan.

-Je vous engage donc à être extrêmement prudent avec vos amis Red Hawk, certains se sont déjà dressés de façon ostentatoire à la bonne marche de reformes nécessaires parce qu'elles n'ont pas été capable de voir assez loin. La vie n'est pas faite que de plaisir et de joie, votre entrée parmi les Justiciers d'État doit être l'occasion pour vous de démêler le vrai du faux et si nécessaire de reconsidérer parfois un peu cruellement les individus qui se sont prétendus vos amis et qui vous ont peut-être laissé croire qu'ils pouvaient vous faire progresser.

D'un geste lent, Shreck frotta ses doigts pour faire tomber les dernières miettes de patte feuilletée sur le sol.

-Sur ce je ne vais pas d'avantage vous retenir, profitez bien de la soirée et surtout, souriez aux journalistes, termina-t-il en se retournant vers Chip qui discutait avec quelques jolies héritières au grand désespoir de son père.

Le Maire décida alors de s'isoler de cette foule à laquelle il avait déjà abondamment souri, il salua de la tête avec un sourire distingué aux gens qu'il croisait, acceptait leurs félicitations, leur transmettait des banalités et des petites plaisanterie en échange puis atteignit enfin l'extérieur. Il passa un doigt entre son cou et son col de chemise amidonné en soupirant. La soirée était positive, mais il avait pu constater que des noyaux durs se composaient. Rentrant ses mains dans ses poches le Maire leva les yeux au ciel pour regarder les étoiles. Ce n'était pas un fin astronome et l'étude du ciel l'intéressait autant que la peinture sur soie au XI ème siècle dans les provinces chinoises, à dire vraie, il fixait plus l'immensité du vide que les étoiles. Son mandat ne faisait que commencer, cette soirée allait mettre de nombreuses pendules à l'heure, mais dès demain les charges qui lui incombait reviendraient.

Il prit une profonde inspiration et rentra à nouveau dans le bâtiment, il y avait encore beaucoup de poignées de main et de bises à donner...

" Docteur Hurt, en réalité madame. Ce n'est peut être pas grand chose, mais c'est une petite pointe de fierté que j'aime bien entretenir."
Répondit-il d'une voix douce et aimable aux salutations de la jeune femme. Malgré son air souriant et bienveillant, la bête en lui s'excitait devant la compagne de Bruce Wayne.
D'après ce qu'il voyait, elle cachait un secret, un heureux secret. Tout dans son attitude trahissait ce qu'elle essayait de cacher : depuis ses regards hésitants à Bruce Wayne avec un micro sourire et ce mouvement de main qui se repliait inconsciemment sur son ventre, jusqu'à la façon dont elle avait repoussé son verre d'alcool après une illumination soudaine pour lui préférer une boisson sans alcool. A n'en pas douter Rachel Dawes était enceinte, et ces doux regards qu'elle lançait à Wayne trahissaient aussi l'identité de l'heureux père. Quelle réjouissance !

" Vous savez, je suis ici dans un but purement professionnel madame, la réception du maire est l'occasion de rencontrer dans un cadre agréable certains futur collaborateurs. Comme vous l'avez souligné, la transition entre Arkham City et New Gotham s'annonce chargée. Je crois d'ailleurs que nous serons amenés à collaborer régulièrement non ? C'est une aubaine de vous rencontrer ce soir ! Voici ma carte."

Le diable tira sa carte de visite de la poche intérieure de sa veste, sur laquelle était inscrit l'adresse de son cabinet, et ses divers numéro professionnels.

" Dîtes moi donc, comment percevez vous l'initiative de New Gotham madame ?"

Excusez-moi alors, Docteur, dit-elle en appuyant bien sur le terme de « docteur » avec un petit sourire amusé, chacun de nous a ses petites manies.

Elle était un peu plus détendue maintenant qu’elle était à l’écart de la foule, loin du bruit et de la fureur. Et puis ce fameux docteur Hurt lui inspirait bien plus de sympathie qu’elle ne l’aurait cru au départ. D’ailleurs, elle fut surprise d’apprendre qu’il n’était pas aussi près de Shreck qu’elle ne l’aurait cru au départ. C’était un bon point non négligeable, vu le mépris qu’elle éprouvait pour le nouveau maire. Mais bon, comparé à l’ancien, on était carrément en progrès, vu que le précédent avant tenté de la faire tuer par ses mercenaires. Shreck restait heureusement dans le domaine du verbal.

Je suis également ravie de vous rencontrer en chair et en os, docteur Hurt. Pour l’instant je n’avais qu’entendu parler de vous, et j’avoue que se parler de vive voix, c’est beaucoup mieux.

Elle attrapa sa carte, y jeta un rapide coup d’œil et la glissa dans sa petite pochette, avant de reporter son regard sur son interlocuteur en souriant.

Eh bien je pense que New Gotham City est une des meilleures choses qui pouvait arriver après le désastre d’Arkham… Laisser ces détenus en liberté entre des clôtures électrifiées était la meilleure solution pour les transformer en animaux… Il y a beaucoup de projets mis en place pour la réhabilitation des détenus, pour qu’ils puissent regagner dignement le droit de revivre parmi les citoyens de Gotham. D’ailleurs, vous avez lu l’article disant que Pamela Isley allait être responsable de l’écologie à New Gotham ? Je trouve ça vraiment bien, un bon exemple. Reste maintenant à voir comment tout ceci sera appliqué… Et vous, qu’en pensez-vous, docteur Hurt ?