Vivre dans son univers avait du bon, ça éloignait les mauvaises pensées, celles qui rappelaient que le monde véritable était régit par les lois de la physique et de la logique. Drury allait probablement le découvrir alors que son terrible gang coloré allait de nouveau répandre la terreur dans les rues de Gotham. Pas de Moth-mobile ce soir, une erreur de réglage de l'injection avait rendu son moteur similaire à une tome d'emmenthal fermier. La voiture louée à grand renfort de pied de biche était ce que l'on pouvait nommer sans mentir une antiquité. Un modèle antédiluvien avec remontée des vitres manuelle et, critère tout à fait discriminant, pas d'antivol électronique qui sonnait dès que l'on avait la fâcheuse idée de pulvériser une vitre.

Bon, certes maintenant il y avait un courant d'air, mais les grands voyous du monde entier vivaient avec des problèmes de ce genre, il fallait composer et se dire que le mal n'attendait pas et nécessitait quelques sacrifices. Assit à la place du mort, Drury trépignait comme à son habitude, il avait observé pendant des semaines le boui-boui qu'ils allaient braquer pour se faire la main. Comme il le regrettait, le monde n'accordait pas de niveau d'entraînement ou de tutoriel pour le monde criminel, alors il fallait créer ce genre de travaux pratique soit même: on trouve une cible facile et on teste des méthodes de travail dessus. Ce soir, le "My Alibi" allait connaître une animation de tous les diables, la crème de la gente criminelle allait débarquer, ils pourraient même y apposer une pierre commémorative comme publicité, il imaginait ça d'ici "Ici est passé le tout puissant Killer Moth et son terrible gang".

- Chef, fit le moth-conducteur, le moteur y toussote.

Et un rapide coup d'œil dans le rétro-viseur permit de voir que le carburateur était incontinent. Pour la première fois de sa vie quelqu'un lui fit le coup de la panne, dommage que ce soit un membre de son gang. Bon, ils n'étaient plus très loin de Park Row, mais tout de même, c'était une preuve compromettante de laisser une voiture volée ainsi, sur le bord d'une ruelle mal famée. Si la police la retrouvait, elle risquait de trouver ses empreintes partout! Il commença à paniquer, mais que faire? Il porta à son masque son gant orange et tapota un instant sur son front. Il observa un temps son gant et ceux de ces sbires. Mais...mais c'était bien sûr! Il fallait brûler le véhicule!

Le groupe se remit en marche, laissant derrière lui le brasier qu'il avait allumé avec l'allume-cigare. Bien, Park Row se dévoilait à présent. Un quartier dans toute sa décadence! Entre immeubles délabrés et chantiers arrêtés aussi rapidement que leurs financements, quelques vagabonds et voyous arpentaient les rues. Ce soir le taux de dangerosité du terrain venait de connaître un pic fabuleux, le sublime Killer Moth foulait ces pavements de toute sa splendeur. Le lieu-dit, nom de code "Gargote", apparut devant eux. Un certains nombres de motos et cylindrées s'alignaient sur sa devanture, signe d'une activité fleurissante et donc d'un public qui pourrait l'admirer à l'œuvre et hurler de peur pour l'ambiance. L'argent n'intéressait pas Drury, il était milliardaire après tout et plus que de la stupidité, il recherchait de la gloire. En l'occasion, il alliait un non moins excellent plan d'entraînement avec un parfait plan publicitaire.

- L'opération "Lombric facétieux" entre dans sa phase agressive, annonça-t-il à ses fidèles moths.

Ça ne voulait rien dire, mais ça avait la classe. Les cinq hommes de ma...les cinq moth-hommes de main étaient parés, leur chef avait tout prévu, autrement dit, le hasard ne pourrait pas les surprendre. L'intérieur était pouilleux vu d'une paire de jumelle à travers les carreaux sales et les quelques donzelles qui géraient les lieux étaient des donzelles, par là même, elles n'étaient pas un problème, plutôt une cible facile. Ce serait aussi simple que de couper du beurre avec un chalumeau. Drury se frotta les mains et gloussa de plaisir, il vendait peut-être la peau de l'ours avant de l'avoir tué, mais l'avantage était que l'on profite un peu avant de mourir.

Le groupe s'accroupit comme pour éviter d'être vu depuis les fenêtres et le vent sournois se mit de la partie. Il fit voleter les quatre ailes orange fixées sur son dos et l'une d'elle se coinça malicieusement sous une roue de motos.

- Gnii...gémit le criminel qui redorait le blason du mot même en essayant de tirer dessus.

L'opération connut alors son premier revers, le véhicule en question glissa et s'écroula sur un autre qui à son tour s'écrasa sur un autre, c'était comme un domino day avec des domino à 50.000 dollars pièce. Il fallait maintenant agir vite!

- Plan K, hurla le chef en se relevant.

Il fallut une bonne seconde pour que les moths passent en revus les autres plans et tombent sur le bon. Le chef ouvrit la porte suivit par ses hommes de mains, ils manquèrent de tous tomber sous le coup de la précipitation et tinrent comme ils le purent en joue l'intégralité de la salle. Leurs fusils bariolés de vert et violet observaient tour à tour les clients et les gérantes. Killer Moth prit la pose de son héroïsme mal placé et posa ses deux mains sur ses hanches. Il se sentait infiniment puissant et imaginait la peur infinie qui tiraillait leurs entrailles.

- Plus un geste malandrins car voici devant vous l'alpha et l'oméga du crime, l'essence même du mal qui ronge Gotham! Le grandiose et fantastique Killer Moth! L'invulnérable et invincible Mite du mal, fléau des fléaux, forgée dans les flammes même de l'enfer!

Ses moths hochèrent de la tête en signe d'approbation. Une bonne entrée, donc une bonne soirée.

- Maintenant que nul ne bouge pendant que nous vous délaissons de vos biens les plus précieux hin hin hin.

Il tendit alors un index vers le plafond. Il fallait s'assurer que le message était bien passé aux travers du brouillard de la peur latente.

- Quiconque s'oppose au Moth-gang finit tôt ou tard par le payer alors vous feriez mieux de coopérer et votre soirée reprendra son cours normal. Me suis-je bien fait comprendre?

Drury était plus que motivé, il avait passé une semaine à apprendre par cœur ses petites répliques. Il décocha alors son pistolet à filet version 2.4 fait maison en prenant une pause dramatique que l'on ne voyait que dans les films de série Z. Il était fier comme un coq d'avoir ainsi créé une bulle de silence parfaite autour de lui. Ses hommes, toujours munis de leur cagoules violettes déformées observaient attentivement les alentours, prêts à faire feu. L'un d'eux commença à s'approcher d'un coin de l'établissement avec son sac de voleur frappé de la mite du gang. Derrière lui seuls l'encourageaient les ricanements satisfaits de son chef.

Hors-Jeu :

Spoiler:

Les clients affluaient ce soir. Des habitués certes, mais avec quelques amis en plus ! Une bande de bikers quasi complète se livrait à une partie de poker électrique, tandis que quelques-uns parlaient bagnoles un peu plus loin. Ça empesait l'alcool, la sueur et l'huile de moteur.
Au bar, Otto s’empirait des tacos fraîchement préparés par Countess. Cette dernière était une excellente cuisinière à ses heures perdues. D'ailleurs, la charmant blonde était à ses côtés, en train de déguster un milk-shake à la fraise. Elle était la seule serveuse ce soir, Holykate était de repos, et Stella aux abonnés absents, du moins temporairement. Elle avait eu une soudaine envie d'acheter du poulet chez Spaulding. Ces derniers-temps, la femme-fatale était taciturne et capricieuse, pire que d'habitude. Quelque chose devait la tracasser, mais fidèle à elle-même, trop fière, elle ne disait rien.
Tout à coup, la porte d'entrée s'ouvrit en trombe, d'une manière tellement inattendue que tout le monde se tourna vers lui.
Cinq guignols dans des costumes criards venaient de débarquer dans l'enceinte du My Alibi. La pin-up tatouée, prise de panique, ne put s'empêcher de retenir un cri.
Un des membres du groupe, le plus mal habillé et vraisemblablement le chef prit la parole, avec un panel de postures aussi ridicules les unes que les autres.

" Plus un geste malandrins car voici devant vous l'alpha et l'oméga du crime, l'essence même du mal qui ronge Gotham! Le grandiose et fantastique Killer Moth! L'invulnérable et invincible Mite du mal, fléau des fléaux, forgée dans les flammes même de l'enfer! Maintenant que nul ne bouge pendant que nous vous délaissons de vos biens les plus précieux hin hin hin. Quiconque s'oppose au Moth-gang finit tôt ou tard par le payer alors vous feriez mieux de coopérer et votre soirée reprendra son cours normal. Me suis-je bien fait comprendre? "

Les clients s’exécutèrent, avec une mine aigrie. Le vigile lui, avala calmement son tacos et posa les mains sur le comptoir, impassible. Il y avait bien trop de monde même si chacun d'entre eux (sauf Countess) savait se défendre. Ne pas sortir Morphine et ses copines. Il avait plus ou moins manqué à son devoir en se relâchant ce soir, c'était la faute de ces maudits tacos...
Ils avaient beau être armés, ces criminels n'étaient pas crédibles. On dirait qu'ils sortaient d'un très très mauvais film de science-fiction, avec leurs costumes d'insecte. Des poses dignes d'un navet, et une réplique ridicule. Depuis quand un bar aussi malfamé se faisait braqué ? Ok, c'était un repère de criminel mais tout de même, il y avait un certain ordre. Heureusement que la maîtresse des lieux n'était pas encore là. Cette pensée fit sourire le colosse, qui pensa à haute voix en voyant un des types s'approcher d'un habitué.

" Je parie 500 dollars que Stella fera la peau à ce prétentieux lorsqu'elle rentrera. " déclara-t-il dans un sourire narquois pour briser le silence.

Un autre biker à l'autre bout du bar doubla la mise, malgré les mains sur la tête. Puis, un autre allongé face contre-terre surenchéri encore. La situation prenait une tournure grotesque, que la belle blonde tatouée eut du mal à comprendre avant de rencontrer le clin d'oeil de son collègue.

" Elle va cirer le plancher avec sa gueule. "

Éclat de rire général. Des rires gras, moqueurs, avides de bagarres. Oui, valait mieux les tenir en appétit les gaillards avec quelques provocations. Histoire de voir si leurs petites menaces ce n'était pas du flan. Mais il était vrai que la sombre étoile risquait d'être dans une rage sans précédent en découvrant sa propriété prise d'assaut, et ses colères étaient bien connues ici.

" Je vous sers une bière ? " bredouilla Countess dans un sourire peu rassuré, afin de rentrer dans le jeu qui se mettait en place.

Bon, maintenant qu'ils étaient entrés, avaient failli dévaler l'escalier qui menaient à la salle principale et avaient hurlé leurs menaces, il fallait analyser la situation. Techniquement un criminel ordinaire aurait fait l'inverse: analyser la situation puis vociférer ses menaces, mais Killer Moth et le moth-gang (ou la moth-familly, c'est vous qui voyez) n'étaient pas exactement normaux. Après une rapide inspection, Drury remarqua qu'il y avait des ouvertures vers des petites salles, mais qu'est-ce qu'on pouvait bien y faire? Boa, probablement des salons de dégustation. Il y avait une grande brute devant un plat de bidules mexicains dont le nom lui échappait et une sorte de Marylin Monroe derrière un bar. Le meuble qui servait de bar semblait d'ailleurs avoir vécu la guerre. Quatre Moths étaient toujours sur le qui-vive, le bar semblait se laisser faire. Incroyable. Pour le moment rien à...

Une plaisanterie fusa, puis deux, trois et bientôt tout fut souvenir. Entendre ainsi les gens rire d'un rien (lui en l'occurrence), ne même pas les prendre au sérieux alors qu'ils avaient leur armes et tout et tout, lui remémora ses jeunes années. C'était le monde à l'envers! Ils devraient avoir peur, trembler, la serveuse aurait dû s'évanouir, au lieu de cela elle leur propose une bière! Mais c'est lui qui allait la mettre en bière! Techniquement Drury ne savait pas de qui parlaient les loubards qui avaient les mains en l'air et s'ils parlaient de la pin'up mal fagotée, alors la seule chose qui laverait le sol serait son sang hin hin hin...oh que ça sonnait bien comme phrase! Il fallait qu'il la lance.

- Mais que nenni! cria-t-il pour recouvrir les bruits de leurs rires gras. S'il faut laver le sol de cet endroit délabré (et c'est le cas parce que mes bottes collent un peu quant même) ce sera avec son sang!

Il termina sa phrase en pointant de son gant orange la jeune femme derrière le bar, un genoux à moitié fléchit et l'autre jambe complètement tendue, l'on avait l'impression de voir le bouchon de radiateur criard d'une voiture de luxe tagué par de jeunes voyous.

- Oh non chef, lança un Moth derrière lui. Vous allez quant même pas faire ça. Elle a l'air si gentille.

- Hein, mais...je...quoi? balbultia Dury en tournant le visage vers son moth qui avait eu dans sa voix une tristesse à faire pleurer les chatons des almanach. Mais non, enfin, je...mais c'est...ben...c'est pour l'effet.

- Donc vous allez pas la tuer hein? insista son subordonné avec une pointe d'espoir.

- Ben non mais...c'était pour la réplique... fit lamentablement le chef dont la posture avait perdu en superbe. T'as cassé mon effet...

Le petite couinement qui ponctua sa réponse fit comprendre à son sous-fifre qu'il avait fait une bourde. L'inconscient, il paierait pour cela, il récupérerait la corvée de vaisselle du mois à venir hin hin hin, ça lui apprendra! La mite punit toujours à la hauteur de l'affront!

- Désolé chef, s'excusa le moth en relevant son arme vers les victimes de leur hold-up.

Killer Moth sentit autour de lui ce léger flottement, il avait été ridiculisé, encore. Tout était pourtant calculé et dans son petit carnet reposait LE plan, celui qui les avait mené là à cette grande réussite quoique ponctuée par quelques faux pas. Prenant une grande inspiration, il allait s'apprêter à faire ce qu'il n'aimait pas faire: une démonstration. Tandis que sa main se portait à sa ceinture pour en décrocher son pistolet à filin (la seule arme de son arsenal qui fonctionnait à peut près), ses souvenirs le submergèrent. "Drury la cloche dorée" et tous ses anciens surnoms resurgirent, les rires d'enfants, puis d'ados et d'adultes dans les soirées les plus chics lui revinrent. Ces baroudeurs, ces infâmes résidus qui ne valaient pas mieux que les taches de bières et d'huile qui recouvraient leurs t-shirts ou leurs chemises bon marché. Il allait leur apprendre, la colère de la Mite allait s'abattre sur eux!

Sa respiration devient celle de la bête ailée. Le déclic de son arme qui se décroche fait accélérer la vitesse de son cœur. Il sent derrière lui les ailes de son costumes qui deviennent une extension de lui-même, oui, la mite en lui se réveillait de son sommeil et ils n'allaient pas l'aimer! Le bruissements de son gant qui se resserre sur le manche de son arme lui rappelle l'ouverture de la chrysalide, il sent l'adrénaline le submerger alors que le temps se ralentit autour de lui. Ses hommes de mains comprennent ce qui se passe, c'était le premier point culminant de la confrontation, ou leur chef se couvrirait de gloire ou tout serait perdu.

- Prépares-toi masticateur de Tacos, à payer l'addition!

La voix que Drury aurait aimé rauque et pleine d'assurance fut transformée en un couinement atroce, le stress étreignant ses cordes vocales. Avant que sa main tremblante ne se soit stabilisée, il appuya sur la gâchette de son arme orangée. Une masse grisâtre cousue main fut propulsée du canon et s'envola en direction du gorille qui avait cru bon de commencer les blagues. Le filet le happa et l'englua à son morceau de bar, renversant son assiette par terre et bousculant quelques sièges miteux rafistolés avec les moyens du bord. C'était un moment incroyablement grisant: il avait réussit quelque chose devant un large public à la base très incrédule! S'il n'avait pas eu son masque, tout le monde aurait pu admirer ses yeux brillants de joie et sa bouche grande ouverte de stupéfaction. Derrière lui, ses moths étaient tout aussi surpris. Ils n'en revenaient pas et commentèrent entre eux cette petite réussite.

- Hin hin hin, ria-t-il de plus belle. J'ai réussi! Woohoo! Plus rien ne l'arrête! Lorsque se déchaîne la bête, chantonna-t-il, c'est la mite du mal, votre cauchemar infernal, préparez vos côtes, car voici...

-Killer Moth! crièrent en cœur ses comparses pris dans la tourmente de leur joyeuse stupidité

- Et si vous croyez que c'est tout, détrompez-vous! J'ai encore plein d'autres surprises dans ma hotte hin hin hin! Alors maintenant on se calme mes bedonnantes victimes! Vous deux, aidez votre collègue à délecter nos piteux amis hin hin hin.

Ses deux hommes de mains y allèrent avec grand plaisir. Maintenant seuls avec son compère, dos à l'escalier de l'entrée, il savait que plus rien ne pouvait s'opposer à lui! Il posa fièrement ses mains sur ses hanches comme un super-héros du crime. En posant ses yeux sur la barmaid, il se souvint que cette greluche s'était moquée de lui et avait failli pousser à la révolte l'un de ses fidèles. Elle allait le payer! Il s'approcha de quelques pas d'elle, posa comme il le put un coude sur le bar, gêné derrière lui par ses ailes orangées, il aurait aimé avoir la pose d'un cow-boy comme dans les western. Au lieu de cela, il ressemblait à un gamin qui jouait au dur, ne lui manquait plus que le hochet et la sucette rouge et blanche en spirale. Il lui déclara avec son ton le plus impérieux possible (pour cela imaginer une flûte écrasée par une cornemuse bouchée).

- Quant à toi, sers-nous ton meilleur jus de fruit! Dans Cinq verres propres!

Il se pencha alors sur le bar comme pour faire une confidence à la jeune femme, ses deux jambes ne touchaient même plus le sol. Il rajouta tout piteusement.

- Euh... avec des pailles c'est possible?

[HRP]Comme Drury le dirait candidement "C'est pas la taille qui compte"[/HRP]

" Mais que nenni! S'il faut laver le sol de cet endroit délabré; et c'est le cas parce que mes bottes collent un peu quant même. Ce sera avec son sang! "

Il pointa Countess du doigt. Quelle erreur !
La blonde, se sentant désignée, poussa un cri strident, comparable à celui d'une souris alors qu'un sbire de Killer Moth s'indignait par un tel acte. Elle avait peur, même si elle voyait bien que ces bandits étaient novices en la matière. Le mot "sang" lui donna des sueurs froides.
La situation était vraiment très drôle, mais Otto retint la menace à l'encontre de la jolie pin-up. Drury allait payer cher ses paroles. Très cher. Il allait perdre surement quelques dents et se faire briser deux-trois côtes. S'il osait la frapper, c'était de sa vie qu'il allait payer son insolence. Es-ce qu'il se doutait au moins dans quel pétrin il se mettait ?
Visiblement puisque le "criminel en chef" dégaina une étrange arme, vraisemblablement un lance-filet.

" Prépares-toi masticateur de Tacos, à payer l'addition! " grogna la mite d'une voix des plus agaçantes.

Puis, il tira en direction du vigile derrière le bar. Le colosse fut happé par un filet collant. Englué au bar, il regarda dans un haussement de sourcils l'assiette de tacos tomber au sol. Il voyait ça au ralenti. Merde, c'était ses préférés en plus.
Countess sursauta en entendant l'assiette se briser, et fixa avec une moue désolée son collègue, puis la nourriture éparpillée au milieu des tabourets. Elle s'était donné tant de mal pour faire ces tacos. La pin-up blonde décida de ramasser les restes de sa cuisine et de l'assiette, le coeur lourd. Elle regarda un instant le Moth-Gang, dépitée après avoir constaté que Killer Moth s'extasiait sur son exploit avec ses sbires. Jeter sa préparation à la poubelle fendit son âme de cuisinière.
Otto quant à lui, restait immobile dans le filet, analysant la situation. Il la trouvait pathétique, et ces brigands de seconde zone allaient morfler sévère. Morphine dans la poche de sa blouse s'affolait, l'envie de piquer était forte, mais il valait mieux attendre les ordres. Stella n'allait sûrement pas tarder. Comme pour calmer ses pulsions meurtrières, il inspecta le filet qui l'enveloppait. C'était comme de la barbe-à-papa, donc pas très solide, mais étant donné que ceux qui les braquaient avaient l'air sûr de leurs coups, autant leur faire espérer jusqu'à l’arrivée de la patronne. Y'allait encore avoir de la casse, ça allait coûter cher en réparation mais ça en vaudrait sûrement la peine. Un seul mot de la femme-fatale, et le carnage pouvait commencer.
C'est alors que Drury s'avança vers la charmante hôtesse tatouée, en demandant un jus de fruits, et plus discrètement, des pailles. Countess rougit et baissa les yeux.

" On n'a pas de jus de fruits ici " répondit la jeune hôtesse de sa voix douce et hésitante. " Nous n'avons que de l'alcool. Désolé... "

Alors là, c'était le must. Otto éclata d'un rire gras, suivi par quelques autres qui vidaient joyeusement leurs poches en voyant les trois insectes soumis venir vers eux. En éclatant de rire, ils montraient leurs portefeuilles à moitié-vide. Ils contenaient à peine quelques pièces, mais ce que le Moth-Gang ne savait pas, c'est qu'il y a une heure encore ils étaient plein à craquer. Mais la sombre étoile avait proposé une partie de poker, non sans rafler le tout ensuite.

" Au fait l'insecte, Stella c'est pas elle " déclara un biker à la cantonade en désignant Alexis d'un hochement de tête.
" Ouais, la patronne est un vrai tyran, et une sacrée tricheuse ! " rétorqua un autre en donnant un mouchoir usagé à un sbire.
" Je ne ferai pas de mal à une mouche " confirma timidement la jolie blonde fixant à nouveau le criminel. " Par contre c'estt vrai que Stella... "

Le colosse scotché au bar donna un léger coup de pied dans les mollets de la jeune fille pour attirer son attention. Pas manqué, elle le regarda avec incrédulité, interrompue dans ses propos. Avec ses traits de poupée en porcelaine, elle était vraiment jolie. Personne ne pouvait un jour la voir devenir violente; elle n'en avait pas la carrure. Au moins ça qu'elle n'avait pas hérité de son barbare de père.

" Countess fait de très bons milk-shakes " affirma le vigile dans son accent, le regard posé sur le costume criard de Drury.

Discrètement, il montra du doigt à la jeune fille une bague poison en argent, sur laquelle était monté un émeraude taillé. À l'intérieur, une poudre rouge. La Red Dust. L'arme du crime concernant le meurtre du docteur Lawrence, l'ancien psychiatre de Stella. Les deux employés étaient au courant de cette manigance macabre, et gardaient l'information secrète.
La jolie blonde, pas stupide pour autant, comprit très bien là où voulait en venir le vigile: saupoudrer les boissons lactées de sable rouge. Ces imbéciles n'y verraient que du feu après tout.
Faisant comme si rien n'était, elle présenta son sourire le plus radieux à Killer Moth et ses sbires, les fixant un à un avec ses beaux yeux de biche.

" Chocolat, fraise, banane, pomme ou mangue messieurs ? "

Puis, elle prit un air plus sérieux, limite sévère, aussi sévère que celui d'une petite fille en colère.

" Pour avoir renversé mes bons tacos ça fera cinq dollars chacun ".

Toujours en équilibre sur le bar crasseux, Drury fut littéralement bousculé par le rire tonitruant du mangeur de Tacos. Il ne s'y attendait absolument pas, surtout après sa petite démonstration. Il aurait aimé avoir un bon mot, mais l'utilisation de ses capacités cognitives pour le formuler prirent toute l'énergie de son centre moteur, lequel était occupé à gérer les bras qui tremblaient sous l'effort. Son coude droit lâcha le premier, renversant le criminel qui émit un petit bruit, le temps tout du moins que son casque rejoigne la surface collante du bar. Sonné par le choc, il ne fit rien pour ralentir sa chute et atterrit le sol tout aussi sale que le reste. Sa jambe droit frappa dans un tabouret haut qui lui tomba dessus et il agita lamentablement ses bras en quête de secours, renversant une autre pièce du mobilier au passage.

Sa tentative pour se relever fut particulièrement lamentable. Il chercha un temps à s'accrocher à un élément de décor du bar en vain avant de rouler sur le côté, pliant du même coup deux de ses belles ailes oranges. Il se releva ensuite à la manière d'un ressort avant de chercher du soutient auprès de la surface du bar, encore sous le choc de son embrassade avec la pièce de bois. Autour de lui les rire continuaient et la serveuse dont la voix harmonieuse détonnait avec l'endroit lui expliqua qu'il n'y avait que de l'alcool ici. Ah c'était comme ça! On bafouait le droit inaliénable de boire autre chose que du désinfectant parfumé? Eh bien il allait leur montrer! Hin hin hin! Sitôt que le monde aurait cesser de tourenr autour de lui, il leur montrerait comment... on vomit? Non, que...enfin il se comprenait. Il était la mite tueuse! Il était la nuit de cette ville! Il donnait son sens au mot corruption! Il était l'or qui recouvrait l'armure étincelante du crime!

Alors qu'il se redressait pour accomplir son diabolique dessein, de nouvelles phrases le surprirent. Autour de lui, comme s'il était un simple client qui venait pour discuter, les gens lui parlaient. Non mais il leur manquait des cases ou quoi? Il était pas là pour bavarder, il était en train de les piller! Au moins ils ne parlèrent pas pour rien, il découvrit que la blonde était une simple employée et que... ben la "patronne" alias "Stella" ou l'inverse il ne savait pas exactement était autre, une tricheuse, tsaa, de toute façon on ne pouvait pas faire confiance aux femmes, sa propre mère l'avait abandonné, il savait à quoi s'en tenir. Outré cependant par leur comportement, Drury ne prit pas garde à la petite conjuration qui se tramait dans son dos puis la blonde (pas la bière hein, la serveuse) proposa à la place des jus de fruits des Milk-Shake! Oh oui oui oui! Tous les amateurs de mauvais films aimaient se retrouver sur un canapé moelleux blottis entre deux coussins avec des milk-shakes entre les mains pour savourer le visionnage et le Moth-gang se faisait tous les jeudi soir une projection d'un nanard dans ces exacts conditions (pop-corn et canettes de soda en plus pour éviter de devoir se lever en cours de route). Ses hommes firent dès lors valoir leurs opinions sur la saveur.

- Banane pour moi!

- Oh j'adore le chocolat!

- Je préfèrerais mangue s'il vous plait.

- Oh bah tient pour moi aussi.

- Va pour pomme mademoiselle.

Mais la jeune femme voulait qu'ils les paient!!!!!! Qu'ils les paient eux? Alors qu'ils les volaient tous? Drury ne répondit pas tout de suite à l'affront. A la place, il chercha à rejoindre l'arrière du bar définitivement décidé à accomplir sa sinistre vengeance. Ne trouvant pas du premier coup comment on faisait pour passer de l'autre côté, il entreprit d'enjamber gracieusement le mobilier. Il prit un peu d'élan, sauta avec, il fallait le reconnaître, un certain talent et s'aperçut en plein vol qu'il n'avait pas assez de vitesse. Ses tibias percutèrent les bords du bar, il poussa un cri inhumain déformé par le choc de ses poumons avec le second rebord et il fit une très jolie roue pour atterrir finalement sur le dos. Ses Moths tinrent en apnée jusqu'à ce que la petite voix de leur chef fit:

- Vous auriez pas pistache par hasard?

Il se releva comme un petit vieux et on esprit mit un certains temps à remettre où était le plafond et où était le sol. Killer Moth tendit ensuite un bras incertains sur une bouteille rangée sur une étagère et la brandit comme un trophée.

- Vous vous êtes moqué de nous parce que nous ne buvons pas l'alcool? cria-t-il à l'adresse de tout le monde. Eh bien je vais vous en priver hin hin hin! Vous apprendrez à ne plus vous moquer de la mite!

Son geste fut superbe. Le gant orange fermement accroché au goulot de la bouteille il fit un arc de cercle impeccable jusqu'au rebord du bar. Le verre entra en contact avec le bois et ... rien. Il y eut un pathétique petit "clonk" et la bouteille rebondit. Il y avait pourtant mis toute sa force! Ne reculant devant aucun obstacle, il recommença à nouveau avec moins d'élan mais des petits cris désespérés.

- Gnii, gnii, gnii... Mais tu vas te casser maudite bouteille?

Il s'échina un temps en testant toutes les positions qui lui vinrent à l'esprit pour essayer de la briser, un contorsionniste qui cherchait à écraser une araignée avec une pantoufle à ressors n'aurait pas fait mieux. En désespoir de cause, Drury se décida alors à la jeter au sol. Victoire! La bouteille éclata, pas de cette belle explosion dont nous régale normalement le cinéma, cette belle explosion bien centrée qui montre une répartition équitable des éclats, tous de la taille la plus convenable en plus, non, celle-ci fut particulièrement réaliste. La bouteille se désagrégea depuis son point d'impact pour ensuite renvoyer la plupart de ses éclats (tous de tailles variables mais aux bords particulièrement bien effilés) en retour de force, c'est-à-dire pour les moins férus de physiques d'entre vous, vers Drury qui dut se protéger de ses gants. Le liquide se répandit partout autour de l'impact.

Grisé par ce petite victoire, Killer Moth balaya de leurs étagères toutes les bouteilles qui firent comme leur précédente camarade, c'était un concerto magnifique d'éclats et de couleurs de toute sortes. Il voulut ensuite se dépêcher de rejoindre une autre étagère, mais le sol devenu glissant lui fit perdre l'équilibre, il tenta de se raccrocher à un morceau étrange sur le bar, lequel n'était rien moins que le manche de la tireuse à bière. Il évita certes de rejoindre un sol recouvert de verre pilé, mais le bruit de plastique qui se brisait et de métal qui se pliait ne lui laissa rien présager de bon pour la suite. Le manche vibra alors comme une soupape de pression dans un film d'action. Un geyser de bière vint directement arroser le casque du criminel et ses cris furent noyés dans le houblon. Il essaya de calmer l'hémorragie en plaquant ses gants, mais il faisait pire que mieux en arrosant une partie de l'assistance.

- A-t-ongl glbliidée de mettroublg des truluuc blareil dans un gloup bâr!!! hurla-t-il.

L'un de ses moths lâcha son sac et tira sur une aile de son patron pour l'aider à se sortir de là (comprenez qu'il espérait le projeter de l'autre côté du bar). Le vêtement, las de tous les traitements qu'on lui faisait subir, se déchira et l'homme de main tomba en arrière, toujours agrippé à un morceau d'aile orange. Il percuta une table et renversa les verres ainsi que les consommations qui se trouvaient dessus.

- IiiGLiLGik! mon costuglm! s'emporta le chef de la bande en voyant l'horrible spectacle.

N'écoutant que plus son courage et son audace, la mite tueuse maintenant privée d'une aile, décida de remonter sur le bar, après tout il était maintenant aussi poisseux que lui et n'aurait aucune honte à s'y montrer. Il prit appui sur une chaise qui serait désormais à jamais marquée d'une empreinte de pas du plus grand criminel de Gotham City (empreinte à 45 degré d'éthanol environ). Maintenant debout sur le bar, il toisait la salle de toute sa splendeur. Dégoulinant de mousse, il tendit un bras inquisiteur sur la blonde et prit une inspiration pour lui lancer une belle réplique.Il se sentait inspiré et devait rétablir un minimum de cliché pour rétablir la piètre qualité de sa prestation. Derrière lui la tireuse continuait à pomper et n'eut bientôt plus rien. Comme une ivrogne s'apercevant que son verre était vide, elle fit un formidable bruit semblable à une lente agonie et expulsa un dernier jet de mousse qui fit sursauter Drury. Son pied gauche, aussi malhabile que le droit se reposa mal et l'on aurait pu croire qu'une force invisible avait happé le criminel tellement il chut vite. Le tabouret qui le réceptionna vola en éclat, un peu comme les bouteilles précédentes. Le Moth en faction arriva alors pour tenter de le redresser. Toujours aussi fier, Drury refusa son aide, il avait déjà vécu pire (et vivrait probablement pire plus tôt qu'il ne le pensait). Le chef de la bande se retourna alors et vit qu'il restait des bouteilles sur une étagères. Il saisit le fusil des mains de son Moth qui s'écarta aussi sec de peur qu'une mauvaise manœuvre réduise le gang d'une unité.

- Observez maintenant la puissance de Killer Moth! Tremblez mortels!

Il appuya avec force (et inconscience) sur la gâchette. Après un bruit de tonnerre qui fit trembler tous les verres de la pièce et sursauter les moths, le fusil, mal tenu naturellement, prit la poudre d'escampette et vint assommer un biker situé sur une table derrière lui. Sans même vérifier la provenance du bruit qui venait dans son dos, la mite maîtresse du mal se pencha en avant pour voir s'il avait fait mouche sur la cible. Il regarda en l'air et autour de lui. Rien, pas une trace de balle ni de chevrotine, pas un endroit roussi. Ses oreilles sifflaient pourtant encore du bruit de la détonation, il n'avait pas rêvé. D'ailleurs le monde était devenu bien silencieux d'un coup. A côté de lui, un moth agitait les bras d'un air malheureux. Et ce sifflement qui n'en finissait pas.

- J'ai oublié de mettre des vraies cartouches boss, je suis désolé, geignit le Moth, je pensais qu'on partait vraiment en exercice et pas en simulation. Je...

- VRAIMENT, hurla Killer Moth comme si de rien n'était, TU DEVRAIS PARLER UN PEU PLUS FORT PARCE QUE LÀ JE NE T'ENTENDS ABSOLUMENT PAS! BON, C'EST PAS TOUT ÇA MAIS QUANT EST CE QU'ILS VONT NOUS LES DONNER LEURS MILK-SHAKE?

Il se secoua un instant la tête pour que le bourdonnement disparaisse mais le monde restait affreusement silencieux. Autour de lui le petit nuage de poudre se dissipait peu à peu.

- MAINTENANT VOUS SAVEZ À QUOI VOUS EN TENIR BANDE DE VAURIENS! cria-t-il de plus belle, pensant avoir été du plus bel effet.

Le plan d'Otto sembla fonctionner puisque les sbires commandèrent chacun un milk-shake. Ce qu'ils pouvaient être cons, c'était vraiment des amateurs, mais en même temps, l'innocence et la beauté de Countess combinés étaient surement un atout majeur dans l'affaire. On pouvait vraiment rien lui refuser.
En revanche, les charmes de la donzelle ne semblaient pas atteindre Killer Moth. Pour lui, pas question de payer puisqu'ils étaient censés les voler, mais la situation était tellement grotesque que toutes les provocations semblaient permises. Aucune logique ne semblait habiter les lieux.
Le vigile toujours emprisonné dans son filet se délectait de ce spectacle pitoyable, et son rire redoubla lorsque le criminel atterrit malencontreusement derrière le bar. Dans un soupir pénible, le chef de la bande demanda le parfum pistache; sans réponse. La belle hôtesse tatouée n'avait pas bougé d'un pouce, mais regardait avec ses grands yeux de biche le pauvre Drury. Au bout d'un certain temps, il se releva, visiblement sonné, puis empoigna une bouteille prise au hasard sur l'étagère murale accrochée derrière le bar.

" Vous vous êtes moqué de nous parce que nous ne buvons pas l'alcool? Eh bien je vais vous en priver hin hin hin! Vous apprendrez à ne plus vous moquer de la mite! "

Dans un élan presque héroïque, la mite tenta de briser la bouteille sur le rebord du bar, sans succès. Les rires redoublèrent en intensité; même Countess, dans un premier temps effrayé ne put retenir un léger rire cristallin. Désespéré, le criminel injuria la bouteille, tentant encore et toujours de la casser, jusqu'à ce qu'il la jette au sol, exaspéré. Ça fonctionna si bien qu'il entreprit de renverser toutes les autres, de la même manière, dans un bruit fracassant. Tous les clients assistèrent à cette scène, le souffle coupé, choqués de voir leur principale source d'énergie voler en éclat, et s'écouler sur le sol.
Alors que Drury voulait renverser la seconde partie de l'étagère, il glissa sur une épaisse flaque alcoolisée, puis, ne trouva rien d'autre que le manche de la tireuse à bière pour s'accrocher. Pliant sous son poids, le manche se brisa et laissa échapper son précieux breuvage au visage de Killer Moth, arrosant au passage la jolie pin-up, qui laissa échapper un cri de surprise. Une joyeuse cacophonie pour une grotesque comédie.
Les bikers présents dans le bar ne purent s'empêcher d'écarquiller les yeux un peu plus, touchés au plus profond de leur virilité. Otto, toujours dans son filet, observait silencieusement, à la fois amusé et dépité de voir tout cet alcool gâché, tout en imaginant la facture pour le réaménagement. C'est la patronne qui n'allait pas être contente, et puis ça allait coller par terre, pire que maintenant....
Un des sbires se décida à venir au secours de son chef en espérant le tirer de ce mauvais pas, mais il fit pire que bien en tirant sur une des ailes de son costume, et atterrirent malencontreusement sur une table derrière lui, renversant toutes les consommations présentes.
Le miteux criminel, ayant perdu un de ces attributs volants, pleura son costume d'un goût douteux, puis décida de se dresser sur le bar. Dominant la salle, il pointa à nouveau la jolie blonde du doigt, visiblement prêt à lui lancer une cinglante réplique, mais fut interrompu par le cri d'agonie de la tireuse à bière. Ce bruit l'avait tellement surpris qu'il en tomba. Un autre de ses compères tenta de l'aider mais il essuya un refus. À nouveau sur pied, Killer Moth s'empara du fusil de son sous-fifre et le mit en joue, direction les dernières bouteilles restantes. Prenant peur, Countess s'écarta du bar et s'accroupit derrière Otto, cachée derrière ses larges épaules.

" Observez maintenant la puissance de Killer Moth! Tremblez mortels! "

Il se passa peu de temps entre cette phrase et la détonation. Malgré son tir déterminé, l'arme échappa des mains du criminel, pour assommer un jeune biker occupé à boire le verre de rhum qu'il avait eu peine à sauver. Le coup de feu résonna jusqu'à dehors, et arracha un hurlement terrifié à l'hôtesse tatouée, meurtrissant au passage les oreilles de son collègue.



Ce boucan n'avait pas échappé à Stella, qui venait à peine de se garer devant son établissement. Jonchée sur sa vieille Harley dans un état impeccable, la femme fatale finissait son cigare, les sourcils froncés. Elle entendait qu'il y avait de l'ambiance au bar, mais elle n'y prêta pas attention, préférant se perdre dans ses pensées les plus inavouées. Toutefois, le coup de feu et le cri d'Alexis la tirèrent de sa rêverie. Pas le temps de se demander avec exactitude ce qui se passait à l'intérieur: ces deux derniers sons lui avaient suffi pour réveiller son esprit combatif. Le danger pour son employée, elle n'aimait pas ça.
N'écoutant que son instinct, elle prit la direction de son établissement, armée de son seau rempli de poulet frit, tout juste tiède. Accompagnées par le rythme du pas rapide de la brune incendiaire, les attaches de ses rangers détachées jouaient de leur mélodie métallique, dans une cadence affolée.
En moins de temps qu'il faut pour le dire, la gérante du My Alibi arriva devant la porte et y donna deux coups de pied d'une force et d'une rapidité presque insoupçonnée chez une femme. Mais connaissant l'américano-italienne, ce n'était pas très étonnant avec son éducation de soldat.
En entrant dans le bar, elle poussant violemment le sbire resté à l'entrée, adossé contre la porte. Il percuta la rembarre donnant sur la salle, roula autour de la rampe horizontale et tomba inconscient en contrebas. Dans sa chute, la nuque du moth heurta le rebord d'une solide table. Le coup du lapin, ça ne pardonnait pas.
Les clients s'étaient tournés vers la maîtresse des lieux. Le temps sembla se figer, le silence qui régnait peu de temps avant l'apparition de la femme-fatale se fit plus pesant dans la pièce. Même Otto et Countess restaient muets, sans pour autant quitter leur patronne des yeux. Ils savaient bien que ça bouillonnait dans les veines de leur supérieure.

La gothamite laissa son regard de vipère survoler la salle; bien vite, elle remarqua les bouteilles brisées, quelques tables renversées, et la tireuse à bière bonne à changer. Fais chier, que d'argent foutu en l'air. Puis, un à un, elle dévisagea les membres du Moth-Gang restants, avec un éclat glacial au fond des pupilles. Celui qu'elle venait de tuer par hasard, elle s'en contrefichait.
Enfin, ses yeux d'émeraude virent se poser sur Drury. Sans le quitter des yeux, elle prit au hasard un morceau de poulet frit dans le seau qu'elle tenait toujours en main, et dévora la volaille d'une manière aussi avide que sexy. Malgré ces gestes en apparence décontractés et lascifs, la plantureuse trentenaire foudroyait le criminel du regard, et ne laissait rien présager de bon quant à la suite des événements. Si elle avait des crocs venimeux à la place des yeux, il serait déjà mort. Elle avait parfaitement compris ce qui se passait en voyant les bouteilles brisées, les armes et les costumes tape-à-l'oeil du Moth- Gang. Putain, ce que c'était moche à voir. Son bar, se faire braquer par une bande de ploucs . C'était la meilleure.
Une fois la viande terminée, elle fit glisser l'os entre ses doigts jusque dans la paume de sa main droite. La colère de Stella irradiait la pièce.

" Tu ferai mieux de déguerpir ma grande," murmura le vigile à l'attention de la jolie blonde. " Ça va pas être joli joli. "

Elle hocha la tête, et comme pour confirmer les dires du colosse, la serveuse tatouée quitta doucement l'arrière du bar pour se réfugier dans le salon privé le plus proche. Ça allait saigner, et elle le savait. Rien que d'imaginer le carnage éventuel qui allait suivre, elle en frissonna. Dans ce calme avant la tempête, deux tours de clef se firent entendre. Le clairon avant l’assaut.
L'os dans la main droite fit les frais de la rage de la sombre étoile. Dans un craquement sinistre qui résonna dans toute la pièce, il vola en éclats, alors que le seau de poulet dans la main gauche tombe tout droit sur le sol.
La gérante du bar malfamé prit la parole, de sa voix rocailleuse et sexy.

" Écrasez-moi ces punaises. Lui, il est pour moi. " ordonna t-elle froidement en pointant Killer Moth du doigt. " Exécution. "

Avait-elle pressenti qu'il était le chef ? Peut-être. Mais elle l'avait surtout choisi au pif.
À peine le dernier mot prononcé que des hurlements dignes de créatures occultes déchirèrent le silence, les tables encore dressées furent renversées et des chaises fendirent l'air pour terminer leurs courses contre les murs. Un des sbires en prit une en plein visage alors qu'un duo de brutes épaisses se dirigeait vers lui, prêts à lui faire sa fête.
Pendant ce temps, Otto esquissa un sourire mauvais, et en l'espace d'une seconde, déchira le filet pour en sortir, tel un papillon sortant de sa chrysalide. Sans que Killer Moth n'ait le temps de faire un geste, visiblement dépassé par les événements, l'immense vigile se mit silencieusement derrière lui et empoigna férocement ses bras, tout en sortant de sa blouse une de ces seringues chargées en morphine. Connaissant les points sensibles relatifs aux nerfs, la mite se retrouva bloquée, et bientôt, une fine aiguille se retrouva sous sa gorge, prête à y être plantée. Il n'allait pas lui faire de mal, du moins par pour l'instant, et aller laisser la plupart du gâteau à sa patronne.
Cette dernière s'avançait d'un pas décidé vers Drury, écrasant au passage quelques morceaux de verre. Pas une fois elle ne glissa, pas une fois elle ne regarda les membres du moth-gang se faire passer à tabac. Focalisée sur son nouveau punching-ball humain, l'envie de cogner était là, comme une envie de pisser. La violence autour d'elle faisait rage, et ne faisait qu'accentuer la pulsion qui l'habitait. Et puis, ça faisait longtemps qu'il n'y avait pas eu de baston générale dans son établissement. Ça allait coûter cher en réparation, mais ça allait sûrement valoir le coup.
Une fois arrivée près du criminel pris en otage, la femme-fatale fit craquer sa nuque et ses doigts.

" J'vais te faire regretter d'être né mon salaud. "

Tout s’enchaînait à une vitesse folle, et les coups de poing dans l'abdomen du criminel ne tardèrent pas à venir. La rapidité de la brune incendiaire était assez surprenante, tout comme la force violente qu'elle mettait dans ses coups. Impassible, le vigile retenait le chef de la bande fermement, l'empêchant de riposter. Et là, un coup de genou dans les parties. Quelle chance, il n'avait pas pensé à la coquille ! Normal, avec un costume aussi bas de gamme. Otto lâcha Killer Moth et retourna derrière le bar, semblant chercher quelque chose sous le comptoir.
Profitant de son état de faiblesse, Stella poussa violemment Drury d'un coup de pied dans le plexus, afin de le faire tomber sur un sol suintant d'alcools en tous genres. Pour agrémenter le tout, quelques éclats de verre virent se planter dans son bras gauche.
Le sourire qu'affichait la jeune femme, entre séduction et sadisme s'élargit lorsqu'elle lui écrasa l'entre-jambe, comme pour l'immobiliser et intensifier sa douleur. Décidément, cette femme était aussi belle qu'impitoyable.

" Alors sac à merde, quel bon vent t’amène ? " demanda t-elle au criminel en le fusillant du regard. " T'es gonflé de venir foutre le boxon ici ! " Je vais faire en sorte que ce qui te sers de couilles ne soit plus prêtes de gonfler, elles.

A ce derniers mots, elle augmenta la pression sur l'entrejambe du criminel, sans ménagement.
Le vigile revint vers eux; il avait rangé sa seringue pour la troquer contre un polaroid, caché minutieusement derrière le bar. Il connaissait trop bien sa patronne, et se doutait bien que se renseigner sur ce criminel de pacotille serait une priorité pour lui faire du chantage. Silencieusement, après avoir jeté un regard sur la bagarre générale un peu plus loin, il s'approcha du criminel à terre, et s'accroupit près de lui, en prenant soin de lui immobiliser les bras d'une simple prise en main.
La femme-fatale sortit de son décolleté un cigare, suivit de près par son Zippo fétiche, le sourire toujours aussi vicieux. Lorsque son employé mastoc lui tendit le vieil appareil photo, elle s'en empara rapidement. Le cigare fumant au coin de ses lèvres pulpeuses, elle regarda dans le viseur de l'appareil, et dirigea le petit objectif vers Drury. Connaissant la marche à suivre, le vigile enleva d'un geste vif le casque du criminel, sans aucune douceur.

" Fais-nous un sourire avant que je te refasse le portrait ", ricana la sombre étoile en appuyant sur le bouton.

Tandis que la photo de Drury Walker se dévoilait aux yeux du vigile ayant réceptionné la photo, le casque de la mite tueuse vola au-dessus de la rixe générale, pour enfin atterrir près du moth décédé peu de temps auparavant. Mauvais présage ? Possible.

Le monde sifflotant n'était guère plus accueillant pour Drury que celui qui était bruyant et chaotique. Il n'entendit pas le bruit des sangles de rangers mal attachées, il n'entendit pas l'alarme silencieuse que l'univers venait de déclencher pour préparer l'arrivée d'un nouveau venu dans l'au-delà, même s'il chercha à se frotter l'oreille droite avec son gant. La mite maîtresse du mal était encore fière d'elle, postée tel un césar qui attendait l'acclamation du peuple, elle fut surprise de voir la porte du bar s'ouvrir. Killer Moth eut un mouvement de recul en voyant l'un de ses sbires s'envoler littéralement. Le pauvre eut un petit couinement proche du jouet pour chien passé sous un tracteur agricole et s'écrasa avec une puissance plutôt incroyable dans la décoration style "je savais pas où mettre ça alors que je l'ai jeté là". Le bruit que fit sa nuque provoqua des frissons dans chaque membre du Moth-gang sauf le chef pour qui seules les flûtes à bec de la surdité étaient audibles.

La créature, le mot femme étant réservé à une catégorie de personne dont Drury savait reconnaître quelques détails* avait un regard que l'on ne pouvait pas considérer comme charmant, quoi que si, comme pour les scorpions, il y avait de quoi attirer l'œil mais rien qui donne envie de s'approcher trop près. Elle portait à première vue un sceau dont le taux de graisse aurait pu rivaliser avec le plancher des lieux et elle dévora avec une avidité toute personnelle une petite cuisse. Ses lèvres bougèrent, mais aucun son n'en sortit, Drury plissa pourtant les yeux pour l'entendre. Les moths alentours se resserrèrent un peu, le scénario prenait des airs de redites et de ritournelle mortelle. Ce soir ils finiraient probablement autour de la boîte à pansements, faute d'avoir une Bible dans la moth-cave.

La jeune blonde partit se réfugier sans que leur chef ne dise mot. Il regardait cette étrange et cruelle veuve noire avec sa dégaine de biker mal éduqué. Ce devait être la gérante des lieux. Il pointa son index des grands discours et voulut ouvrir la bouche mais les lèvres de son opposante furent plus vives. Elle le pointa du doigt tandis qu'aux alentours commença une étrange bataille désorganisée. Il avait l'impression de vivre un film muet sans sous-tire ni pancarte qui lui expliquait l'intrigue. Il n'entendit que les premières détonations des armes des moths qui ressemblaient au bruit que provoquaient les petits gros à la piscine qui faisaient une bombe alors que l'on essayait de battre son record d'apnée. C'était sourd et plutôt surprenant.

La grosse brute qui se gavait tantôt de Tacos sortit de son cocon, comme régénéré, et attrapa la mite comme un fagot de paille pour l'empêcher de bouger. Drury voulut alors répliquer, n'ayant même pas remarqué la présence d'une aiguille près de sa nuque.

- MAIS Y VA ME LÂCHER MONSIEUR PROPRE! cria-t-il (plus fort encore que s'il avait voulu parler sans rien entendre, je vous laisse imaginer les aigües).

La créature du diable s'approcha de lui. Il savait reconnaître les problèmes lorsqu'ils arrivaient, même avec un déguisement low-cost de jeune femme. Elle fit quelques mouvements indistincts, comme pour se donner de la constance. Le premier coup de poing lui fit comprendre que son sixième sens avait vu juste, elle était bien dangereuse. Le deuxième déboucha son oreille droite et le troisième son oreille gauche. Il fut autant assommé par les coups répétés que par l'engloutissement de son sens auditif dans les bruits de bagarres. L'estomac de Drury était solide, il avait goûté pendant plus d'un mois la nourriture qu'il avait cuisiné lui même, mais il fallait reconnaître que cette espèce de corbeau mal maquillé frappait fort et avec, songeait-il, une pointe d'expérience. Encore une qui n'avait pas compris l'intérêt des études. Il avait souvent été la victime des gens de son espèce, il regrettait seulement qu'il ne puisse plus en parler au passé.

Des larmes de douleurs commencèrent à ruisseler sur ses joues. Le Crime que Drury incarnait n'avait rien à voir avec celui de cette perverse sadique. Il incarnait un bon goût qu'elle n'avait pas, il était un esthète qui faisait rimer crime avec rime et bonne humeur plutôt que terrorisme. Son entraînement aurait dû lui permettre de se faire la main et de voler quelques malandrins qui ne l'auraient pas volé (techniquement, ils auraient pu le voler vu leurs bras). Tant de violence brute n'était pas criminelle, elle était stupide, puérile. Il eut un petit rictus alors qu'un nouveau coup de poing lui remettait le pancréas en place. Elle piquait une grosse colère quant même. Tout ça pour trois bouteilles et un truc pour servir la bière.

La violence est reconnue chez les gens comme précisément la force du faible, l'ultime barrière de l'incompétence, autrement dit, la violence sépare le grain de l'ivraie. Mais le problème c'est que ce genre de raisonnements vaut la peine d'être prononcé lorsque l'on est bien assit derrière un bureau, pas pendant que l'on se faisait tabasser. Alors que les coups s'accumulaient et que, soyons francs, il faisaient mal, Drury cherchait une solution. Beaucoup d'entre nous auraient probablement un cerveau qui secouerait un drapeau blanc et des entrailles qui voudraient l'entacher d'orange, pas Drury. Son esprit et son corps travaillaient sur des fréquences différentes, une sorte de réflexe défensif du jeune homme dont les jambes devaient le mener à un endroit le plus vite possible pendant que son cerveau cherchait une destination sûre parmi toutes les options viables qui se présentait à lui.

La douleur est malheureusement universelle et là, la mite du crime avait bien mal, ce qui entrecoupait ses périodes de réflexion. On pouvait dire qu'elle n'y allait pas de main morte, il aurait dû mettre le feu à cet endroit, même s'il n'était pas Firefly. Il ne songea pas un instant qu'il aurait pu racheter cet endroit sous Cameron Van Cleer et le faire démolir sans l'embraser, l'aspect théâtral de la chose avait un je-ne-sais-quoi de plus séduisant qu'une simple opération financière. Son estomac fit la connaissance d'un nouveau groupe de phalange. Ses idées se remirent dans une nouvelle direction, celle de l'urgence désespérée.

Derrière eux, les moths se battaient, il fallait le reconnaître avec une certaine prestance. L'un d'en deux était secoué violemment et se prenait des coup de tabourets comme une pinata, un autre parvenait à faire régner l'ordre à grand coup de crosse de fusil dans le dos d'une brute qui venait de rouer de coup l'un de ses amis et le dernier quant à lui courait indistinctement dans la foule en tirant des coup de feu en l'air avec son arme chargée à blanc. Ne manquait plus que la musique du manège enchantée et la scène eut été surréaliste.

La voix, qu'il fallait reconnaître pas trop moche, de la "patronne" retentit pour menacer Killer Moth. Il aurait aimé lui répondre que la seule personne gonflée était celle des deux qui pouvait se vanter de pouvoir casser des noix avec sa poitrine, mais elle décida d'en casser avec son genoux. Nous pourrions dire que Drury ne put pas crier, nous pourrions dire qu'il ressentit alors la douleur ultime, ce qui dans l'Histoire d'un Homme reste gravé comme un coup de fer rouge aux fesses, mais il avait vécu une enfance désœuvrée face à la violence, il avait connu des vernissages avec ses parents, il avait faillit mourir devant des super-criminels et les triades chinoises, il avait connu le métro, il avait foncé à pleine vitesse dans un nombre hallucinant de double-vitrage pendant qu'il testait son jet-pack ou son filin, bref, il avait été le plus attentif artisan du panel complet des dégradés et teintes de la souffrance. Le coup qu'elle lui infligea rentra certes dans l'extrême le plus grand mais ne provoqua rien d'autre qu'une immense contraction de son corps entier et grava sur son visage une immobile grimace de douleur. Il ne cria pas et se laissa tomber au sol.

Des morceaux de verre vinrent se ficher dans son bras gauche. C'était presque comme de la glace qui permirent à son cerveau de rediriger son attention. Il avait ses mains libres, autrement dit il avait la possibilité d'agir vite et... Une ranger, le genre de chaussure qui venait dans la catégorie "ignoble" bien avant les chaussures de ville dans l'esprit du criminel vinrent le tenir en respect au niveau de ce que la jeune femme devait considérer comme l'unique levier du monde. Il se garda de faire l'étendu de l'activité de cette harpie si elle ne résonnait qu'en terme de.... enfin le public avertit aura compris. Certaines idées songeait Drury sont trop personnelles pour que d'autres y pensent à leur place. Elle amplifia sa pression. Il était sans doute temps de l'écouter un peu.

On lui enleva son joli casque sans aucune vergogne. Cette action, honteuse au passage, était dans le top dix des crimes contre l'Humanité. Si quelqu'un portait un masque, il y avait une raison et c'était bigrement impoli et mal élevé de l'enlever, même après minuit sans accord préalable. L'odeur du bar qui lui était masqué emplit ses sens. Beuargh, hurla son cerveau, mais sa bouche se refusait à tout commentaire puisque la seule chose qui lui venait étaient des jurons enrobés de vomi. Il vit arriver un appareil photographique sans réellement comprendre. Ses quelques pensées se résumaient de toute façon à :

"Ohmondieuunappareilphoto! La porte est derrière!!..... Il me faut du chocolat! Mes pauvres Moths! Bobby ne bouge plus, toi ne bouge plus! Elle t'a dit un truc t'a entendu? Non, de toute façon c'est un cliché cette bonne femme! Mais c'est pas une femme si? Oui mais non! J'ai une aile d'arrachée! Concentre-toi sur tes grenades! T'as des fumigènes! Non j'ai pas arrosé la fougère, mais j'ai pas de fougère! J'ai mal au ventre. Tient, faudra faire de la salade en rentrant. Elleaditdesourire, elleaditdesourire!!!"

Et lorsqu'il résolu à 10 pourcent le Rubic's cube de ses pensée, il déforma son visage souffreteux avec le sourire radieux du parfait imbécile dans un parc d'attraction face à la mascotte qu'il avait toujours rêvé de rencontrer en vrai! Le flash qui surgit termina les 90 pourcent restant. Oui, le plan venait de se révéler à son esprit! Il ricana autant que ses quelques côtes à l'agonie le lui permirent. Oh oui, il avait trouvé comment s'enfuir de ce guêpier. Portait-elle une guêpière? (son esprit n'était pas encore tout à fait remis).

- Hin hin! cria-t-il pour se donner de la constance alors qu'il était encore étalé au sol. Je ne vais peut-être pas refaire ton portrait parce qu'il faudrait trois paysagistes et deux restaurateurs à plein temps pendant un an pour ça mais je vais t'apprendre à ne jamais baisser ta garde!

Il porta sa main droite sur l'une des bombonnes de sa tenue et tourna comme un forcené pour en faire s'échapper tout le gaz fumigène. Lorsqu'il acheva son geste, il entendit le bruit caractéristique d'une bouteille de limonade sous pression, cette fameuse bouteille qu'il avait installé sur sa tenue en cas de petite soif. Le geyser, quoi que peu impressionnant en soit, éjecta le bouchon de la bouteille et voleta jusqu'à l'oeil du colosse à l'appareil photo. Le liquide sucré tenta de noyer le super-criminel qui, pour ne pas changer, perdit ses moyens. Ses mains cherchaient désespérément une solution sur ses différents bombonnes et grenades non létales qu'il avait disposé sur ses lanières, sentant toujours la pression de cette folle furieuse sur sa descendance. Il entendit un petit clic avant d'écarquiller les yeux comme un malade mental!

- Découvrez la colère de la...

La grenade fit son office, noyant l'intégralité du lieu dans une lueur aveuglante. Une note cérébrale se grava à jamais dans la matière grise du criminel: "La prochaine fois: fermer les yeux." La plupart de ses moths qui se protégeaient des assauts de leurs ennemis avaient quant à eux eut les yeux bien fermés pendant l'explosion de lumière. Ils entendaient leur chef balbutier de douleur alors que ses yeux pleuraient comme deux fontaines d'acide surchauffé. Drury se débattit avec force, ne sentant même plus la douleur à son entrejambe agressé par les semelles de son ennemie. Il gémissait plus qu'il hurlait. En voulant récupérer ses mouchoirs, il enclencha un fumigène. Dans cette nouvelle panique, Killer Moth tricota de plus belle des jambes comme un cycliste qui aurait prit une gourde de potion magique de trop et frappa avec une force qu'il ne se connaissait pas un peu partout dans les appuis de sa tortionnaire. Il releva le buste en posant ses mains sur ses globes oculaires en fusion que la fumée agressait de plus belle, entendit le tissu de son entre-jambe se déchirer (révélant au passage un caleçon tout ce qu'il y avait de plus classique: motifs orange et vert fluo styles fin 80-début 90) et se releva avec la force de celui qui espère trouver un bac à glaçons en plein désert. Ses hommes encore un peu sous le choc se réunirent entre leur chef et la porte.

Il y avait devant eux un nuage grisâtre qui toussait en pleurant de plus belle. Ce soir ce serait pour lui gant de toilette d'eau froide et sérum physiologique histoire de calmer le tout. Mais le Moth-gang n'avait pas encore effectué son repli rituel. Les sacs de quête criminelle avaient été abandonnés au profit de l'instinct de survie. Un Moth eut la présence d'esprit de tenter de réveiller leur camarade dont la tête semblait être littéralement dévissée du corps. Le pronostique vital était désormais définitif. Leur chef surgit du nuage et tomba au sol dans l'aspect le plus pathétique d'une chute en solitaire. Ce dernier fut pour la première fois de sa vie, similaire à une mite. Aile froissée, respiration gémissante proche d'un dernier râle, les yeux rougis et gonflés par les mauvais traitements, ses bras dans des positions insensées et ses jambes agitées par quelques spasmes. Une véritable phalène qui avait vu trop de film Jack-ass en les prenant pour des documentaires.

- Gnii...gnii...

Ses moths firent l'une de leurs activités favorites: sauver leur chef d'une mort certaine. Il se jetèrent à trois pour le soulever et le tenir comme ils le pouvaient, le dernier portait leur camarade décédé et ils entreprirent de tous prendre la porte de sortie en même temps. L'escalier, trop petit rendait leur progression digne d'une farandole de carnaval chaloupée exécutée par une bande de drogués.

Le monde tournoya autour de Drury, tout ça avait été trop pour lui. Il voyait les murs s'enfuir de son regard, il sentit l'âcre odeur du port et la couverture lumineuses des étoiles inexistante du ciel. Il ricanait bêtement, ignorant tout ce qui pouvait bien lui arriver. Ses hommes demandaient désespérément à ce qui leur restait de supérieur pour savoir où aller.

- Boss où qu'on va?

- Gnii....

- Vers la cave?

- gniiii...

- Je crois qu'il a hoché de la tête les gars!

- gnii?

Ses moths cherchèrent à passer de part et d'autre d'un poteau électrique qu'il réceptionna en pleine tête. Le coup sembla porter des fruits inattendus puisqu'il se redressa. Les yeux toujours semblables à deux boules de billards rouges, il remit une partie de ses idées en place.

- A la moth-cava, sans plus tarder! Hurla-t-il.

* Stella avait bel et bien les lèvres et les... enfin, l'appareil respiratoire développé d'un être humain de sexe
féminin, mais il lui manquait le regard mouillant comme la blonde ainsi qu'une posture frêle et délicate. Non, elle n'était pas dans la catégorie femelle, elle était dans la catégorie Mante Religieuse qui collectionnait les mariages pour le simple plaisir de décapiter un partenaire. Taxonomiquement parlant, le mite reconnut un ennemi en elle.