Cette nuit là Matho ne doutait pas. Il réussirait son meurtre. Il est tellement facile de tuer, d’enfoncer une lame dans une chaire sans protection. Cette société était terriblement dangereuse, il suffisait de le vouloir pour vous retirer votre vie. Mais bien peu choisissaient de tuer, par manque de courage ou par ce qu’ils appelaient la sagesse. Ca ne faisait que décuplait sa fierté : il était un des rares à tuer pour le plaisir de tuer, dans ce monde, et comme chaque fois qu’on a un talent que rares sont les gens à avoir, on bénissait le ciel de nous privilégier. Certes, pour le reste, à travers sa vie il n’avait pas été gâté. Cette gâterie là du destin lui permettait d’être moins malheureux, d’avoir ce sentiment d’avoir au moins une chose bien dans sa vie, une réussite.
Il revérifia son sac. Tout y était, c'est-à-dire bien peu de choses : la machette, le masque de hockey et la masse. Une partie de la masse, trop longue, dépassait du sac, et il ne pouvait rien faire pour arranger ça. Pas grave : à trois heure et demi du matin rares seraient ceux qui pourraient le croiser et se rendre compte de ce détail curieux, et même si le plus observateur des hommes le remarquait il n’appelerait sûrement pas la police. Bien sûr, l’étudiant avait acheté ces armes il y avait longtemps, plusieurs jours avant le premier meurtre de sa série, cela afin de ne pas jeter sur ses traces les enquêteurs. Il avait du se ruiner pour cela, et l’argent lui manquait tellement maintenant qu’il avait du se résoudre à ne pas diner pendant plusieurs soirs. Il ne s’en inquiétait pas : peut être arriverait-il à se faire inviter à diner par des camarades étudiants pour faire le pique-assiette. Ou pas. Il n’était proche de personne dans l’université, même s’il se forçait à côtoyer des groupes. Il ignorait cependant s’il était accepté d’eux.
Ce soir, c’était Jason, qui frapperait, le tueur des Vendredi 13. Matho n’avait jamais vu un de ces films, c’est pourquoi il s’était renseigné sur wikipédia : il tuerait ses victimes de la manière de ce monstre culte du cinéma.
Tout se passa à une vitesse incroyable. Il avait choisit un quartier au pur hasard. Il se déplaça en voiture et s’arrêta à la première rue. Là, il enfila son masque de hockey. Il descendit, se déplaça une cinquantaine de mètres. Il s’arrêta devant une porte. Une petite maison de deux étages. Une famille y vivait très probablement. Parfait. La porte était fermée à double tour, comme toutes les portes de maison les nuits de Gotham. Il sortit la masse du sac. Sa force lui pesant furieusement sur les bras, éveillant une agréable douleur musculaire, il éleva l’arme, et frappa de toutes ses forces. Le coup assené arracha la poignée avec un gros pan de bois. Il donna quand même un second coup, qui agrandit le trou dans la porte. Puis il ouvrit cette dernière d’un coup de pied. Il se retrouva dans le couloir de l’entrée. Il n’avait pas de temps à perdre : il sorti du sac sa machette du sac. Il arriva dans le salon. Un escalier menait aux chambres, au premier étage. Il y monta rapidement ; il était proche de la porte quand celle-ci s’ouvrit violemment : un homme, alerté par le bruit, venait de l’ouvrir. Matho frappa, aussi vite qu’il le put. Au moins une douzaine de coups. Les hurlements de sa victime retentirent ; le sang éclaboussait partout la verste du meurtrier et le pyjama de l’agressé. Un hurlement retentit bien vite, à l’intérieur de la chambre. Ca devait être sa femme. L’homme s’était tu, et effondré sur le sol. Matho l’acheva en l’égorgeant avec netteté. Comme à chaque égorgement, le plaisir fit battre son cœur. Il entra dans la chambre où les cris de la femme avaient eux aussi cessé. Elle était debout, en sous vêtements sur le lit, et paralysé, terrifiée, elle regardait avec horreur le tueur. Celui-ci sourit derrière son masque. Et il s’en alla, tranquillement. C’était ce qu’il voulait : être vu.
Bientôt il était chez lui, attablé devant un soda, tranquille et détendu. Il s’amusait de la confusion dans laquelle il plongerait les enquêteurs, qui après ce troisième meurtre, devraient admettre l’apparition d’un nouveau serial killer à Gotham. Ses victimes n’avaient aucun rapport familial, physique ou social l’une avec l’autre, aucun rapport de lieu non plus. Le seul point commun qu’on leur trouvait était d’avoir été tué de nuit. On ne le retrouverait pas, ou alors, cela prendrait un sacré temps. Il lava la machette, le masque et la masse, et les rangea tous dans une cachette, sous une lame de parquet. Il écrivit sur son journal la scène, son plaisir, son orgueil et ses craintes. Puis il se prépara à une nuit tranquille.