Les yeux rougeâtres de mon masque se fixent sur la silhouette massive, quelques mètres plus bas. Accroupis sur un toit, j'attends depuis quelques minutes que ma cible sorte enfin de son immeuble, pour que je puisse intervenir directement et l'empêcher de nuire. Il s'avance enfin vers son véhicule, et je vais pouvoir le mettre hors d'état de nuire.



Lester Buchinsky, dit l'Electrocuteur. Le frère du premier dépositaire du nom, devenu mercenaire après avoir essayé de suivre les pas de son prédécesseur comme justicier ultra-violent. Il vend ses services au plus offrant dans tout le pays, échouant régulièrement en prison mais réussissant toujours à en sortir.
Il avait quitté Gotham City il y a quelques mois, après une rencontre houleuse entre lui, quelques alliés et moi. J'ai récemment appris son retour, et je refuse de laisser un adversaire aussi dangereux aller et venir comme il le souhaite en ville.

L'Electrocuteur est un homme violent, destructeur, qui utilise des systèmes électriques pour agresser quiconque ose se mettre en travers de son chemin. Après mes affrontements contre la Biosyn, j'ai besoin de repos, de calme pour me ressourcer après ces épreuves, mais je ne peux laisser Lester à Gotham City. Je dois intervenir.

Je me précipite dans le vide, ouvrant ma cape pour planer et m'approcher silencieusement de l'ennemi - c'était du moins l'idée.
Lester lève les yeux et les bras avant même que je l'atteigne, et il active son dispositif électrique immédiatement. Je suis immédiatement propulsé au sol, roulant pour lui échapper en le sentant déjà s'approcher.

Très bien. Ou Lester a grandement amélioré son attention et sa concentration, ou je suis vraiment fatigué et usé - dans tous les cas, je dois réagir. Il est hors de question que je sois encore touché par ce salaud, et il est hors de question qu'il s'en sorte ainsi.

(HJ/ Petite information : Batman porte actuellement ce costume, mais n'est pas encore beaucoup apparu avec. /HJ)

"Non."

Ma réponse est sèche, froide. Elle ne vient pas uniquement de mon refus d'impliquer une inconnue, terriblement jeune et vêtue d'un costume inspiré par Catwoman ; non, cette réplique si sévère provient également de ma honte d'avoir été projeté aussi aisément à terre par un tel adversaire. Même si je ne sous-estime l'Electrocuteur, il faut bien avouer qu'il ne fait guère partie des criminels les plus dangereux, et je dois me reprendre.

"Fuis."

L'ennemi est à terre, et j'ai quelques secondes devant moi pour retrouver mes marques. Mes yeux rougeâtres se fixent sur la fine silhouette qui vient de m'aider, et j'espère que mon visage est suffisamment grave et dur pour qu'elle comprenne qu'elle n'a rien à faire ici.
Rapidement, je braque mon attention sur l'adversaire, et m'empare de deux petites sphères à ma ceinture. Un lancer adroit me permet de les faire exploser à quelques centimètres de son visage, ce qui propulse l'Electrocuteur à quelques mètres. Sa combinaison l'a protégé du gros du choc, mais je peux au moins espérer quelques dégâts et quelques secondes encore.

Je me relève définitivement, prends deux Batarangs et me prépare au combat quand je me rends compte que l'adversaire m'a pris de vitesse. Visiblement, son costume est plus protecteur que je ne le pensais, et deux immenses gerbes d'électricité sont propulsées de ses avants-bras, dans ma direction et celle de la jeune inconnue.

Je parviens, grâce à une roulade, à éviter l'attaque, qui détruit une partie du mur derrière moi. J'espère que la jeune femme parviendra à faire de même, mais je me concentre sur la principale menace en lançant mes deux Batarangs vers l'Electrocuteur - avec un peu de chance, tout se finira vite et je pourrais oublier ces mauvais moments.

"Je t'ai dit de fuir."

Ma voix est âpre, dure.

Après ma roulade, je me suis rapproché de la jeune inconnue, survivante par miracle d'une nouvelle attaque de l'Electrocuteur. Celui-ci, occupé à arracher mes Batarangs de son épaule et de son torse, nous offre quelques secondes de répit, en se concentrant sur ses douleurs et en hurlant sa colère ; espérons que cela soit suffisant pour l'évacuer d'ici.

"Ce combat n'est pas le tien."

J'aperçois sans difficulté le poignard tenu par la jeune femme, et je comprends qu'elle est peut-être moins inoffensive que prévu - mais ça n'empêche pas qu'elle ne me semble pas à la hauteur. Outre sa tenue, qui ne me plaît guère dans l'esprit, je refuse de laisser quelqu'un d'aussi jeune évoluer sur les toits à cette heure, et affronter l'Electrocuteur.
Il n'est pas parmi les plus dangereux malfrats de la ville, mais il est dangereux... et mortel.

Lester Buchinsky pousse un nouvel hurlement en jetant au sol le Batarang jusque-là fiché dans son épaule. Il se retourne vers nous et projette deux nouvelles gerbes d'électricité, mais avec moins d'adresse qu'avant : la douleur doit le gêner.
J'en profite pour pousser la jeune inconnue devant moi, autant pour la protéger que pour l'encourager à fuir. Je m'empare d'un nouveau Batarang, que j'envers vers le visage de l'Electrocuteur - il n'est pas assez rapide pour l'éviter.

Aveugle pour quelques minutes, il est une proie plus acceptable et je me précipite, malgré ma fatigue, pour l'achever. Ma botte vient frapper lourdement son torse, avant que mon genou n'écrase son nez déjà plusieurs fois brisé par des agressions similaires.
Avec un peu de chance, cela devrait suffire - avec un peu de chance, l'inconnue sera déjà partie.

Un Batarang pénètre dans le mur juste devant Catgirl, bloquant son avancée.
Elle n'ira pas plus loin.

A quelques mètres d'elle, je me tourne lentement vers la jeune femme. Autour de moi, la rue est jonchée de gravats et de ruines, conséquences de mon rapide affrontement avec l'Electrocuteur. Quelques instants plus tôt, j'ai propulsé mon adversaire contre un mur, et il en a profité pour disparaître.
Le connaissant suffisamment, je sais que j'ai pu endommager son armure et qu'il va maintenant se cacher pour lécher ses plaies ; ça me suffit pour le moment.

"Ne nous quitte pas aussi rapidement."

Au loin, j'entends également les sirènes. Je connais suffisamment le G.C.P.D. et ses problèmes actuels, après l'explosion du commissariat, pour savoir que j'ai encore une poignée de minutes avant de devoir les affronter. Cela sera amplement suffisant.

"Tu es jeune - trop. Tu es inexpérimentée - trop. Et tu n'as pas le droit de porter ce costume - jamais."

Mon regard rougeâtre se fixe définitivement sur elle. Mon corps est trop fatigué, trop fourbu pour que je m'approche encore ou que je la combatte, mais je peux encore user de mon influence, de mes techniques et de mon poids dans la joute verbale pour la convaincre.

"Arrête tout ça, dès ce soir, ou je te traquerai. Je remonterai ta trace, je découvrirai ton identité, je te retrouverai et je te ferai face. Avec tes parents, tes proches et tous ceux auxquels tu tiens. Ne me défie pas."

A elle de décider - à elle de faire son choix. Espérons qu'elle soit un peu plus intelligente que tous les autres jeunes "justiciers" que j'ai croisés ici.

Je m'empare de mon grappin, que je lève vers elle. Cette jeune femme, cette "Catgirl" fait l'erreur de me tourner le dos lors d'une mauvaise soirée et de porter un costume qu'elle ne mérite pas. Elle a eu l'occasion de saisir sa chance - qu'elle assume maintenant.

Sans remords, j'appuie sur la détente, et la pince s'échappe du grappin, rapidement suivie par un épais filin. Avant qu'elle puisse se retourner ou l'éviter, la pince pénètre dans la chair de cette "Catgirl", au-dessus de son omoplate et de ses os.
Sans lui laisser le temps de réagir, je tire un coup sec sur le filin pour l'attirer vers moi et la faire tomber au sol. C'est là sa seule place.

"J'ai le droit de l'ancienneté et de l'efficacité de porter ce costume. Tu n'es qu'une petite-fille qui pense s'éclater dans une voie qui ne t'apporte que la souffrance, l'humiliation et qui te fait risquer une mort bien douloureuse."

Les sirènes sont de plus en plus bruyantes : d'ici quelques secondes, la police sera là et elle me posera des soucis. Normalement, je veillerai à disparaître dans les ténèbres, surtout après une soirée difficile et une certaine fatigue mais... je ne veux pas lui donner raison. Je veux faire un exemple.

"Nous allons les attendre. Nous allons voir comment tu survis face au G.C.P.D., et si tu continueras à considérer cette occupation comme ton gagne-pain. Il est temps que tu comprennes les conséquences de tes actes et de tes décisions."

Trois voitures de police se garent autour de nous. Nos costumes sont mises en lumière par les phares des véhicules, tandis que six agents sortent et nous braquent immédiatement, en hurlant des ordres incompréhensibles mais dont le sens est évident.

"A toi de te sortir de là, petite fille."

Je ne réagis pas quand elle se libère.
Je ne réagis pas non quand elle s'en prend aux policiers.
Je ne réagis toujours pas quand elle s'enfuit dans la nuit, blessée mais libre.

Autour de moi, les voitures du G.C.P.D. libèrent un petit flot d'agents, énervés par le sort réservé à leurs collègues par la jeune ingénue. Blessé, fatigué et surtout énervé par la situation, je fixe des yeux rouges de mon nouveau costume ces hommes et femmes qui hésitent, avec raison, à se jeter sur moi.

Depuis quelques semaines, je suis à nouveau considéré comme hors-la-loi. Comme beaucoup, ils doivent être perdus entre les ordres contraires de leurs supérieurs et leur fidélité envers une certaine idée de la justice. Grâce au travail de James Gordon, la police a retrouvé une certaine légitimité en évacuant les corrompus et les violents et en intégrant des jeunes motivés et fidèles aux codes.
En un sens, je me sais un peu responsable de ces changements, dans ma lutte contre le crime et dans mon appui aux activités du commissaire Gordon. Il est donc... difficile de se retrouver à nouveau dans le rôle de l'ennemi.

Dans un soupir, je lâche une petite sphère au sol, qui explose et libère un épais nuage sombre. J'en profite pour disparaître en un long souffle, tracté par mon grappin, qui me propulse au sommet d'un immeuble.

Elle est loin, déjà.
Et je n'ai plus la force de la poursuivre.

Avec de la chance, elle comprendra le sens de mon intervention et abandonnera cette vie. De façon plus crédible, je la retrouverai sur mon chemin, soit comme ennemie, soit comme victime d'un des monstres de cette ville.
Peut-être ais-je mal agi ce soir, peut-être m'y suis-je mal pris - mais j'en ai assez des gants. Elle... ils doivent comprendre qu'ils ne sont pas de taille face à cette ville ; et que je suis le seul à pouvoir la protéger.

(HJ/ Merci pour ce sujet et à bientôt en RP ! /HJ)