12 heures après les singularités
Le Village

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Les gyrophares éclairaient la rue dans laquelle le jour se levait. Les premiers rayons, eux, se faisaient sentir sur les facades des demeures du vieux quartiers alors tous s'affairaient sous les structures du pont, attendant les grues afin de pouvoir continuer...ou du moins, commencer le travail.

Pour Jim Gordon, cela avait commencé comme une nuit banale, teintée de la lueur d'éclairs d'une rare puissance, de trombes frappant les quais et de bourrasques emportant parfois certaines voitures. Mais il en avait vu d'autres au cours de son existence et ce n'était pas une tempête un tant soi peu peu plus violente que d'habitude qui allait empêcher les hommes du G.C.P.D de faire leur travail.
Cela avait été une nuit plutôt calme si on en jugeait la période actuelle dans laquelle régnait à présent la Lignée, période durant laquelle le Batman avait perdu sa juridiction, vaincu par un combattant venu d'une époque lointaine.

Le clivage était présent au sein du G.C.P.D, certains haïssant le mystérieux leader de la Lignée, et d'autres se demandant si il n'était pas temps de passer à des méthodes un peu plus adaptée, ce que Jim avait répondu que lui vivant, jamais plus une période comme celle de Loeb et Branden ne viendrait au monde au sein de ses unités. Un discours qu'il avait terminé en tapant du poing et en laissant une rare expression de colère pure se dessiner sur son visage.

Mais il semblait que ce matin, quelqu'un ait décidé qu'il était effectivement temps de passer à la vitesse supérieur comme en attestaient les 93 corps qui jonchaient à la fois la vieille écluse asséchée du Village qui servait depuis quelques temps de refuge à une bande des Demonz, qui, depuis le No Man's land, n'avaient toujours pas compris où était leur place.
Il fallait imaginer qu'à présent, ils l'avaient trouvé.

Gordon ne refumait que depuis peu de temps, ces derniers mois ayant été une source de stress assez intense pour lui. Une mauvaise habitude qui risquait fort d'avoir des répercussions sur sa santé, bien qu'il s'en fichait dans l'immédiat. Sur l'instant, son regard se perdait sur l'amoncellement de cadavres un peu partout dans la zone. Le terme "boucherie" était encore bien faible pour désigner l'horreur de la scène qui se jouait devant lui. Quant à ses "lieutenants", en la personne de Sawyer, Bullock, Montoya et Allen, ils restèrent interdits devant un tel spectacle et pour tous, il était sûr qu'un nouveau joueur était sur les rangs. Bullock avait lui même admis que la Lignée, bien que brutale, n'allait pas aussi loin dans ses actes, semblait partir dans une mise en scène qui avait tout d'un avertissement.
Mais celui-ci, ce "meurtrier", ou "monstre" comme l'avaient appelés les gens du quartier l'ayant vu....ils n'avaient vu cela.

Qui pouvait avoir autant de haine, autant de colère et de frustration pour mettre en miette ces types? Qui pouvait avoir assez de force pour en finir avec l'intégralité des Demonz en une nuit, eux qui étaient si organisés, si bien armés? Même la Lignée semblait avoir des problèmes face à cette bande de punks qui avait su se garder quelques caisses d'armes volées au Pingouin.

"Je vais vous dire: J'aimais pas les Demonz et plus d'une fois, je leur ai souhaité de mourir....mais jamais j'aurai souhaité une scène pareille."
"Personne n'aurait souhaité une chose pareille, Harvey."
"Faut être un putain de malade pour faire un truc pareil."
"........ou un monstre."
"Killer Croc, tu penses?"
"Non, Croc est toujours à Arkham. Je m'en suis assurée." répondit Maggie Sawyer, partagée entre l'envie de vomir ou de détourner son visage, essayant d'assembler les quelques informations qu'elle pouvait tirer de la scène.

Les médecins légistes qui ramassaient les morceaux un peu partout était pour la plupart formel: C'était l'œuvre d'un ou plusieurs animaux, la seconde hypothèse étant la plus formelle et la plus logique car en plus d'être en morceaux, beaucoup portaient de nombreuses traces de morsures et de lacérations, du moins quand on examinait les deux corps encore en un seul morceau.

Mais cela ne concordait pas avec ce que les gens avaient vu et entendu durant cette longue heure de massacre entrecoupée de hurlements, de coups de feu...et de rugissements semblant venir d'un seul être...et cela ne collait pas avec le témoignage de Dane Cooper, le vieux SDF du Village qui était bien connu de tous. Dane était ce qu'on pouvait les yeux et les oreilles du quartier. Il savait tout et entendu tout et lorsqu'il fût interrogé, il n'eut que ces mots.

"C'était une bête........une bête noire et immense. Elle marchait comme un homme...et ressemblait à un loup. Une bête venue d'ailleurs......"

Ce furent ces derniers mots, les yeux et la voix emplis d'une terreur primaire avant qu'il ne meure mystérieusement sous les yeux de tous, victime à la fois d'une attaque et des nombreuses maladies dont il était porteur. Ses divagations étaient connues des habitants du quartier et plus d'une fois, il avait averti la population, parlant d'une chose venue d'ailleurs, qui viendrait des cieux, portée par la fureur de la nature. 
Il y'a encore un peu plus de quelques heures, Dane avait vécu une nuit normale, transformée en cauchemar, sublimée par les mots qu'il avait autrefois vomi à la figure d'une humanité parfois hilare et sceptique.

Et pourtant, il l'avait vu. Il en avait été resté pétrifié par la terreur, ayant observé sans sourciller l'atroce scène emplie de vérité qui se déroulait sous ses yeux, paralysé par l'horreur du moment présent et bien plus lorsque la bête vint finalement à lui. Durant les quelques mots qu'il avait accordé à la Police, il avait encore l'impression de sentir le souffle chaud de la bête noire sur lui. Il ressentait encore son regard oppressant le toiser comme le jugeant pour ses actes. Cette nuit là, quelque chose venait de lui être ôté, quelque chose qui ne lui serait jamais rendu car aussi fou qu'il avait pu paraitre, Dane était un homme bien plus empli de raison qu'on ne pouvait le croire.

Ce fût la raison que le monstre lui ôta....avant de lui prendre sa vie, quelques heures après. Certes, indirectement, mais la "Bête" était responsable d'un 94ème mort en la présence de ce vieil homme dont le seul crime avait été d'être le témoin d'une scène qu'il n'aurait jamais dû voir...et que son esprit n'aurait jamais pu concevoir, lorsque la bête, repue de son repas, reprit une forme humaine, laissant apparaitre un homme âgé, nu et au corps couvert de cicatrice.

Mais ce regard, ces pupilles blanches virant au bleu....et cette rage sur son visage étaient autant d'éléments qu'il ne pourrait jamais oublier. Une rencontre avec la Bête était comme boire une liqueur forte d'une seule traite, là où elle devait être ingurgitée à petite dose. C'était ainsi qu'on pouvait qualifier la mort de ce pauvre homme, victime d'une overdose de la réalité.

Une mort injuste, triste mais qui serait vengée alors que de son perchoir, le protecteur silencieux du Village observait la scène avec beaucoup d'intérêt. Il était temps à présent pour lui d'entrer en scène car comme en attestait son accord avec le Batman, quiconque frappait au cœur du Village méritait de subir le courroux..............de Simon Dark.