La journée était grise, ce qui n’était pas inhabituel pour Gotham, une journée comme une autre, où les gens se trainaient soit à l’école, soit au travail en essayant d’oublier la crasse de la ville et le sang qui coulait dans ses rues une fois la nuit tombée. Un léger crachin de pluie c’était mis à tomber vers midi, rendant l’atmosphère froide et humide, le propre de cette saison où les feuilles changent de couleur et où la boue couvre le sol avant les premiers vrais gels. Une journée qui n’avait pas si mal commencé pour une adolescente de la ville, malgré ses origines noyer de mystère et le vide astronomique de son portefeuille. Une journée de recherche où la bibliothèque de l’école n’avait pas les livres dont elle avait besoin pour finir son projet, si bien qu’elle avait obtenu la permission de se rendre à celle de la ville. Élève presque modèle bien connue des enseignants pour son assiduité et son sérieux en classe, elle n’avait, semblait-il, jamais abuser plus que de raison des petits privilèges que cela lui valait, par exemple d’échapper à la surveillance de l’institution durant les heures de cours pour un projet ou un autre. Celui sur lequel elle travaillait touchait à la fondation de la ville et les années de gloire de celle-ci, un projet pour le cours d’histoire où elle avait vu une certaine opportunité de rechercher l’origine de la décadence actuelle de la ville.
Ce qu’elle ignorait, c’est qu’elle avait pris tous sauf la meilleure journée pour se rendre dans le vénérable bâtiment et surtout dans la section où elle allait… Asheyra leva les yeux une seconde devant l’architecture impressionnante du vieux bâtiment municipal, elle ne se lassait jamais vraiment de l’atmosphère gothique que l’extérieur de l’endroit n’avait, pas plus que de l’atmosphère de mystère que l’intérieur recelait. Resserrant le col du vieux manteau, qui était trop grand pour elle, lorsqu’une goutte de pluie glaciale et pernicieuse se glissa dans son cou, puis dans son dos, elle se hâta de passé les imposantes portes en bois pour se réfugier au sec. Transie jusqu’aux os, elle prit le temps d’enlever son manteau, de le sécher, puis de sécher ses longs cheveux de jais au séchoir de la salle de bain avant de faire son chemin dans la salle, un peu mieux réchauffé. La saison avait quelque chose de beau, mais pour elle qui n’avait que rarement des vêtements adéquats, c’était surtout un calvaire.
Avec son sac à dos en bandoulière, sèche d’avoir été protégé sous son manteau, un des seuls avantages as en avoir un si grand, elle se dirigea vers la section histoire locale, qui se situait non loin du bureau du conservateur, au deuxième étage. C’est en passant juste devant que ses yeux bleu saphir qui voyait trop se posèrent sur le drame en train de se jouer. Son entrainement de toujours porter attention à tout et surtout à son entourage paya, bien que presque trop tard. Deux hommes étaient dans le bureau du conservateur et l’un d’eux le tenait pendant que l’autre lui garrottait la gorge. Ayant peur d’être trop tard, elle prit la décision d’intervenir sans ses foulards pour cacher son identité et au lieu de les combattre physiquement, elle décida d’user de ses autres atouts, comme son intelligence, en espérant que cela suffirait à éviter un drame de plus, car selon son expérience des gangs, lors d’un meurtre, lorsqu’il y a un risque de témoin, il fallait abandonner la mission et se reprendre plus tard. Elle fit donc la seule chose à sa portée en si peu de temps, elle cria pour attirer leur attention sur elle.
« Lâchez-le ou j’appelle la police!»
Elle avait crié de toute ses forces, évaluant déjà les options qui s’offrait à elle pour la suite et prenant une autre décision dans la fraction de seconde que les deux hommes prirent pour se retourner vers elle. Bien entendu, elle n’avait aucune intention d’alerter la police qui serait certainement de mèche avec eux, mais bien de les attirer ailleurs, de les semer le temps d’enlever son ouaté et de mettre ses foulards pour les arrêter ensuite. Elle ignorait complètement qu’elle s’embarquait pour bien plus qu’elle ne pouvait gérer seule. Comme ils semblaient hésiter, elle prit la première chose qui lui vint à la main, un livre, pour le jeter à la tête de l’homme qui garrotait la pauvre victime, le surprenant suffisamment pour qu’il lâche la corde et le décider, lui et son comparse, à se lancer à sa poursuite. Elle ne pouvait les combattre ouvertement sans risquer de s’exposer plus tard à cause de son style de combat, alors elle se mit à courir en direction des escaliers espérant les semer et les entraîner à sa suite pour sauver le pauvre homme, si celui-ci était toujours en vie…