Les égouts étaient un lieu paradisiaque pour Otis. Il n’y avait pas un chat, au propre, comme au figuré. Aucun bruit n’était perceptible, si ce n’étaient les gouttes d’eau qui transperçaient la vieille tuyauterie, tombant délicatement au sol, formant de petites flaques et résonnant à travers les nombreux couloirs sombres et étroits. Les égouts n’étaient pas faits pour les claustrophobes. L’ambiance qui s’y dégageait était angoissante. L’atmosphère était sadique, perfide, écrasante. Les rares personnes naïves qui s’y aventuraient ne ressentaient finalement que de la peur et se pressaient de ressortir. Les égouts semblaient abriter le mal. Ces lieux n’étaient même pas fréquentés par les criminels réputés. Tous savaient que cet endroit symbolisait la porte des Enfers. Le Cerbère était le Ratcatcher, celui qui le connaissait comme sa poche, le contrôlait et le surveillait.
Accroupi à terre, dans les ténèbres de la folie, Otis dégustait son repas. Un poisson pourri, cru. Quel délicieux mets. Il s’agissait certainement d’un thon. La période d’importation de produits de la mer était sans doute arrivée. Les cargos qui déchargeaient leurs containers laissaient souvent échapper quelques rares poissons qui se faisaient emporter par le courant de l’eau du vieux port jusqu’aux égouts. Une aubaine pour le Ratcatcher qui ne devait même plus sortir de sa cachette pour manger et nourrir ses rats. Il avait l’habitude de manger avec ses fidèles compagnons en leur laissant les restes de son repas. Un agréable équilibre de vie. Mais Otis, perverti par la haine et la colère, en voulait plus. Il n’aspirait qu’à sortir de son repère et de prouver à la population les rumeurs de son retour qui couraient depuis quelques temps. Il était déjà connu pour de nombreux cambriolages et meurtres. Le Batman l’avait toujours empêché de continuer. Mais cette fois-ci, Otis était plus déterminé que jamais. Il était devenu nécessaire de sortir au grand jour et de recommencer à cambrioler et à tuer. Cambrioler, pour nourrir ses amis et se confectionner de nouvelles armes chimiques. Tuer, pour se venger de tout le mal qu’on lui avait fait étant enfant. Les incessantes moqueries et insultes qu'on lui faisait depuis ses premiers jours résonnaient dans sa tête et la lui écrasaient comme un étau.
Dans ses pensées, poisson cru à la main, mâchant la chair de celui-ci, fixant l’un de ses rats en train de manger à côté de lui, Otis préparait ses plans. Il avait toutes les cartes en main pour instaurer la folie et la mort à Gotham. Les rats le serviraient jusqu’à la mort et ses armes pouvaient lui permettre de faire de sacrés dégâts. Le Ratcatcher était spécialiste des armes toxiques, chose que la ville et sa population ne maitrisait pas du tout.
Un bruit soudain se fit entendre tout à coup plus loin dans les égouts, ce qui coupa Otis de ses pensées et le saisit brusquement. Les rats semblaient inquiets, ils ne bougeaient plus. Ils restaient droits, les yeux écarquillés vers leur maitre tout aussi inquiet. Quelqu’un ou quelque chose venait de pénétrer dans les égouts. C’était un affront pour le Ratcatcher. Personne n’avait le droit d’y rentrer. C’était SON refuge, SON repère.
Qui ose venir ici ? Qui a bien pu oser franchir notre porte sans notre permission ?! Ca va lui coûter très cher, peu importe de qui il s’agit ! Mes bébés, allez voir ce qu'il se passe et dites-le moi vite afin que je prenne des dispositions.Les rats regardèrent leur maitre avant de se mettre en route. Ils abandonnèrent leur repas et se dispersèrent partout dans les égouts pour retrouver la trace de l’intrus. Ils se précipitaient par-delà les trous dans les murs, les passages étroits et même la tuyauterie. Tous les moyens étaient bons pour se déplacer dans ces lieux lugubres.
Les rats, par centaines, ne mirent que très peu de temps pour retrouver, dans un premier temps, une ravissante femme. Elle courait et semblait apparemment vouloir échapper à une deuxième personne que les rongeurs aperçurent quelques brefs instants plus tard. Un homme aux allures criminelles. Il fallait se méfier de lui. La femme, elle, semblait toute innocente mais la peur qui était dégagée de son souffle dans sa course était évidente. Il fallait vite prévenir le maitre. Les rats retournèrent donc chez Otis pour lui annoncer la nouvelle.
QUOI ?!Son hurlement de colère résonna dans tous les égouts.
Deux ?! Deux personnes dans les égouts ! Très bien… Ils vont payer pour s’être aventurés chez nous !Otis attrapa fermement son arme en main, se releva et se mit en direction des deux intrus à l’aide des rats qui lui indiquaient le chemin à emprunter pour les retrouver. La colère du Ratcatcher grandissait de plus en plus à chacun de ses pas. Sa détermination était poussée à l’extrême, il fallait leur faire payer leur imprudence. Dans les couloirs morbides des égouts, Otis pouvait à présent distinguer les bruits de pas rapides d’une première personne. Certainement la femme.
Finalement, au croisement de deux chemins, Otis et la demoiselle se rencontrèrent face à face. Elle stoppa sa course. Le Ratcatcher la fixait, respirant lentement dans son masque à gaz. La jeune femme hésita à demander qui était en face d’elle mais n'en eut pas le temps. En effet, Otis, trop énervé, l’agrippa par le cou, serrant fort les doigts, l’empêchant de respirer jusqu’à ce que mort s’en suive... Le deuxième intrus arriva au moment où le Ratcatcher relâcha le corps sans vie de la femme qui tomba violemment à terre.
Qui es-tu toi ? Pourquoi êtes-vous venu dans le repère du Ratcatcher ?!