Les rues sombres de Chinatown étaient habitées par tout type de gens. Des voleurs à la tire, des fumeurs d'opium, des filles de plaisir et tant d'autres humains perdus dans cette quête inutile qu'est la vie. Ils se bousculaient et se perdaient de vue sans jamais se revoir. Une silhouette rougeoyante surplombait l'une des rues principales de Chinatown. Il observait ce qui se passait en arborant fièrement une tronçonneuse dont la lame touchait le toit du bâtiment sur lequel il était.
Il entendait le bruit de ceux qui passaient la nuit à festoyer et à ne rien faire concrètement.

Ketsueki fouilla dans une poche de sa longue veste rouge et en sortit une petite flasque. Il but une gorgée de saké. Il toussa un peu car il avait avalé le liquide de travers. Qu'il était ridicule à s'étouffer avec un peu de saké. Il se mit à rire de lui-même, il s'ennuyait ce soir et il devait faire quelque-chose pour oublier tout ce qui s'était passé durant les derniers jours.
Il courut et descendit dans la rue quand il entendit du bruit à l'intérieur de ce qui semblait être une librairie. Un jeune libraire semblait s'activer à ranger les livres dans les présentoirs.

Ketsueki ouvrit la porte et fit claquer ses talons en entrant. Il prit un air doux et commença à parler de sa voix aigu et légèrement sifflante.

" Bonsoir monsieur. Auriez-vous quelques recueils de Matsuo Bashō ? "

Un sourire carnassier se dessinait sur le visage de Ketsueki.

La nuit était la partie préférée de la plupart des criminels qui sévissaient dans cette ville.
Cependant, Dawson n'était pas un criminel, mais lui aussi adorait la nuit. Parce que la nuit, tout peut arriver et on y fait souvent d'étranges rencontres.
Par contre, Perkins, lui, était bien un criminel en devenir et adorait la nuit lui aussi; il avait bien l'intention de se remettre à tuer et d'assouvir ses pulsions meurtrières, se vengeant du fait qu'il ne puisse tuer son propre alter-ego et vivre comme il l'entendrait.
En parlant de rencontres étranges, en voici une.
Perkins se souvenait bien de cette personne qui entra dans sa librairie ce soir-là.
Il l'avait déjà vue, à la bataille finale opposant la famille Akumu à leurs ennemis. Ils n'avaient pas eu le temps de parler vraiment, mais une chose est sûre, ils se connaissaient déjà.

" Bonsoir monsieur. Auriez-vous quelques recueils de Matsuo Bashō ? "

-Bonsoir Mademoiselle, répondit aimablement Perkins - oui vous avez bien lu. Je dois bien en avoir un, en effet.

Perkins alla le lui chercher dans l'arrière-boutique et revint.

-Navré Mademoiselle, je n'en ai qu'un seul.

Il le lui tendit en se forçant à sourire. Ah oui...les sourires c'était pas son truc..ni l'amabilité, et pourtant il faisait ce qu'il pouvait pour se montrer sympathique et aimable avec elle.
Il avait juste pas remarqué que c'était en fait un homme qui se tenait en face de lui.

Vous savez à quel point l'amour rend aveugle...
Bon...là, c'est peut-être plus qu'aveugle.
Mais Perkins n'aimait normalement personne. Et de plus, Perkins n'aimait pas spécialement Ketsueki.
C'était juste que...bon, d'accord, il avait une certaine attirance, mais c'était tout.

Cette soirée allait être quelque peu spéciale...

-Bonsoir Mademoiselle. Je dois bien en avoir un, en effet.

Il était peu fréquent depuis son arrivée à Gotham que quelqu'un appelle Katsueki mademoiselle. Sa féminité aurait enfin été remarquée. Cela rendait le Yakuza beaucoup moins dangereux. Il se voulait agréable pour une fois avec l'homme en face de lui. Sa tenue était très voyante mais Ketsueki aimait beaucoup être au centre de l'attention.
L'homme partit dans l'arrière-boutique pendant que Ketsueki tentait de se souvenir de son nom. Ils s'étaient déjà vus mais Ketsueki n'avait pas une excellente mémoire pour les noms. L'homme revint en tenant un livre à la main.

-Navré Mademoiselle, je n'en ai qu'un seul.

Ketsueki prit l'ouvrage et le feuilleta. C'était parfait, il y avait même des haikus qu'il ne connaissait pas encore. Il sourit et se retourna vers le libraire.

- Je vous remercie. Combien coûte-il ?

Ketsueki dévisageait le libraire. Il était plutôt pas mal dans son genre mais donnait un air de gentil garçon qui ne savait pas y faire avec les femmes. Ce ne serait sûrement pas la peine de perdre son temps ici. Il avait le livre et cela devrait suffire pour ce soir.

[Pas beaucoup d'inspi ce matin. Je m'en excuse, tu me préviens si tu ne sais pas quoi répondre pour faire bouger la situation.]

- Je vous remercie. Combien coûte-il ?

Perkins allait répondre quand quelqu'un d'autre entra.
Un homme aux cheveux châtains, courts, plaqués contre son crâne, portant des lunettes qu'il ne cessait de remonter et ayant dans ses mains un...sécateur?
Ah oui!
Il s'en souvenait! C'était l'autre là, que le blond appelait sans cesse "Hachi Parmentier".

-Dawson ou Perkins?

-Bonsoir Monsieur.

-Dawson ou Perkins? demanda t-il avec froideur.

-Perkins. Pourquoi donc?

-Simplement pour savoir comment je m'y prends pour vous faire comprendre les choses.

-Et?

Hachi passa derrière le comptoir où se trouvait le libraire et d'une main, le saisit par le col.

-J'ai bien vu comment vous la regardiez la dernière fois! Je n'ai rien dit car je me suis dit que nous étions tous troublés par ce qui s'était passé à ce moment-là, que nous divaguions parfois, qu'on ne savait pas où donner de la tête; normal dans ces moments-ci. Mais maintenant je vous y reprends! Ne vous approchez pas de Ketsueki cha...san...Vous êtes un psychopathe, un assassin sans coeur et sans pitié qui pourrait bien la tuer. Elle peut se défendre, je ne m'inquiète pas là-dessus, mais je ne risquerai pas de la voir blessée, morte ou même déshonorée! Vous m'entendez? Si jamais vous lui faites le moindre mal, si vous tentez quoi que ce soit, je vous torture jusqu'à ce que vous vomissiez et je vous noierai dedans! Compris?

-Compris!..mais vous savez, elle était juste venue prendre un livre, vous n'allez tout de même pas me tuer parce qu'elle est venue acheter un livre chez moi tout de même! Et désolé d'être subjugué par sa beauté! répondit Perkins - en paniquant quelque peu.

-Hmm...soit...je vous laisse tranquille pour cette fois. dit-il en le lâchant.

-Cela fera six dollars Mademoiselle.

-Et vous osez lui faire payer?

-Je fais mon boulot de libraire!

-Baissez d'un ton avec moi je vous prie!

-Vous avez commencé!

-Je suis un yakuza!

-Je suis un psychopathe!

-Je suis le deuxième bras droit de Kagi sama!

-J'en ai rien à faire!

-Vous êtes schizophrène!

-C'est mieux que d'avoir une jalousie maladive!

-Je ne suis pas jaloux!

-Bien sûr que si!

-Bien sûr que non!

Avant qu'il n'ait pu répondre, un visage familier entra dans la librairie. Son costume toujours impeccable et arborant fièrement un sécateur qu'il n'hésitait pas à utiliser dans le feu de l'action. Ketsueki l'avait reconnu et ne put s'empêcher de sourire en le voyant entrer.

-Dawson ou Perkins?

-Bonsoir Monsieur.

-Dawson ou Perkins?

-Perkins. Pourquoi donc?

-Simplement pour savoir comment je m'y prends pour vous faire comprendre les choses.

-Et?

Hachi arriva derrière le comptoir et saisit le libraire par le col d'une seule main.

-J'ai bien vu comment vous la regardiez la dernière fois! Je n'ai rien dit car je me suis dit que nous étions tous troublés par ce qui s'était passé à ce moment-là, que nous divaguions parfois, qu'on ne savait pas où donner de la tête; normal dans ces moments-ci. Mais maintenant je vous y reprends! Ne vous approchez pas de Ketsueki cha...san...Vous êtes un psychopathe, un assassin sans coeur et sans pitié qui pourrait bien la tuer. Elle peut se défendre, je ne m'inquiète pas là-dessus, mais je ne risquerai pas de la voir blessée, morte ou même déshonorée! Vous m'entendez? Si jamais vous lui faites le moindre mal, si vous tentez quoi que ce soit, je vous torture jusqu'à ce que vous vomissiez et je vous noierai dedans! Compris?

Ketsueki souriait de plus belle. Il se serait moqué du libraire s'il l'avait voulu mais Hachi était au centre de son attention.

- Merci Hachi san mais je sais me défendre.

-Compris!..mais vous savez, elle était juste venue prendre un livre, vous n'allez tout de même pas me tuer parce qu'elle est venue acheter un livre chez moi tout de même! Et désolé d'être subjugué par sa beauté!

-Hmm...soit...je vous laisse tranquille pour cette fois.

Il reposa le libraire qui revenait à son travail et demandait six dollars à Ketsueki. La réaction d'Hachi fut instantanée et Ketsueki n'eut pas le temps de sortir les petites pièces de sa poche pour payer.

-Et vous osez lui faire payer?

-Je fais mon boulot de libraire!

-Baissez d'un ton avec moi je vous prie!

-Vous avez commencé!

-Je suis un yakuza!

-Je suis un psychopathe!

-Je suis le deuxième bras droit de Kagi sama!

-J'en ai rien à faire!

-Vous êtes schizophrène!

-C'est mieux que d'avoir une jalousie maladive!

-Je ne suis pas jaloux!

-Bien sûr que si!

-Bien sûr que non!

Ketsueki laissa échapper un bâillement et s'assit sur le comptoir de la librairie. Il avait regardé les deux se disputer. La situation l'avait amusé au début mais ils commençaient à devenir ennuyeux à se chamailler comme des gosses. Quelle était la raison de la dispute ? Ketsueki ne le savait plus clairement. C'était parti si vite sur un détail futile. Rien d'important en tout cas.
Il se leva et commença à parler.

- Calmez-vous tous les deux. Je suis venue pour chercher un livre et pas pour entendre vos disputes. Vous allez finir par me rendre impatiente avec tout ça. Alors je paye où je ne paye pas ? "

Sa dernière phrase était une pique malicieuse et il sentait qu'ils allaient encore se disputer. La situation l'amusait un peu en fait. C'était mieux que de s'ennuyer et ne rien faire dans les rues de Chinatown.

Hachi paya à la place de la dame rouge. Ketsueki avait glissé un léger "merci" à Hachi en lui souriant.

-Quant à vous monsieur Perkins, je vous conseille de ne plus jamais reluquer Ketsueki san.

-Mais je..

-Sinon je vous coupe la tête...

-Avec un sécateur?

-Hai.

-Depuis quand les yakuzas ont des armes bizarres?

-Pour faire parler les psychopathes.

-Vous savez que vous êtes complètement...

Un changement brutal s'était opéré dans l'attitude du libraire. Comme si quelqu'un d'autre avait repris le contrôle de ce corps et qu'ils étaient deux à se le disputer constamment. Il devait souvent se parler à lui-même et être moins seul. Cela fait au moins un avantage de la schizophrénie.

-Bonsoir, puis-je vous aider?...euh..pourquoi vous me regardez bizarrement?

Hachi remonta nerveusement ses lunettes et répondit au libraire.

-Bonsoir, j'étais en train de payer le livre de Ketsueki chan...euh san...qui est...euh...eh bien...

-Ah! Je vois, c'est votre fiancée...

Ketsueki aurait voulu éclater d'un grand rire en voyant le malaise d'Hachi mais un sentiment qu'il ne connaissait pas vraiment l'en empêchait. Un sentiment nouveau. Est-ce cela qu'on appelait l'amour ? Non, ça ne pouvait pas être ça. Il continuait à observer le dialogue entre Hachi et le libraire.

-PAS DU TOUT!

-Si, si, un peu..

Quelqu'un venait d'entrer et avait lâché cette plaisanterie à l'attention d'Hachi. Ketsueki reconnut la tignasse blonde de Juzo. Il était un peu le petit comique de la bande plaisantant au risque de se prendre des coups de talon de la part de Ketsueki.

-Juzo san, je vais vous massacrer...

Ketsueki se mit à rire en regardant le blond débarquer.

- Vous vous sentiez seul Juzo san ?

Ketsueki se tourna vers le libraire et le regarda avec un sourire carnassier.

- Vous pariez sur lequel des deux.

Il était toujours en train de rire et la suite pourrait bien l'amuser. Sa nuit ne serait plus aussi ennuyeuse. Un peu d'agitation amusait le Yakuza rouge.

- Vous vous sentiez seul Juzo san ?

-Bé euh...comment dire...

Hachi courut, prit son élan et envoya valser Juzo dehors d'un formidable coup de pied dans la mâchoire.
Puis il remonta ses lunettes.

- Vous pariez sur lequel des deux.

-Je ne sais pas.

A dire vrai, Bartholomew essayait de faire le point.
Là, y en avaient deux qui se battaient tout en sortant de sa librairie.
Et il n'aimait pas les bagarres.
Heureusement pour lui, les deux étaient à l'extérieur, mais il pouvait entendre les gémissements de douleur du plus jeune sous les coups de pied de son aîné.

-Euh...vous pensez que je devrai ramener la trousse à pharmacie pour votre ami?

Il se sentit un peu mal.
Il savait qu'il avait déjà vu ces gens mais il ne savait où.
Si seulement il savait!

Sa tête lui fit mal, soudainement, un instant.
La douleur fut brève mais suffisamment intense pour qu'il lâche un soupir de soulagement dès que la douleur partit, sans faire attention à ce qui l'entourait.
Durant quelques secondes il eut cru voir quelque chose, sur le mur derrière le comptoir où il était.

Sur le mur en bois, il y avait un dragon peint couleur argent, d'où le nom de l'endroit. Et il crut voir, durant un bref instant, alors qu'il avait ce mal de tête étrange, quelque chose au niveau de ce mur; comme une silhouette humaine, une forme humaine, mais dans le mur tout en lui faisant face.
Il devait halluciner et être fatigué, certainement.
Mais c'est ce qu'il avait cru voir.
Il chassa cette pensée complètement absurde.

Ces derniers temps, tout lui jouait des tours. Son imagination et ses cauchemars lui causaient d'étranges visions.
Il jeta un coup d'oeil à un bouquin posé pas loin, sur le même comptoir, qu'il avait fini de lire il y a peu de temps; "Démences".

Il ne sut pourquoi, il sentit à cet instant que comme la plupart des personnages de ce livre, il serait voué à un triste destin.
Démences.
Ce titre sonnait bien avec ce qu'il lui arrivait ces derniers temps.
Il se sentait comme fou, gravement atteint sans savoir pourquoi.
Ses cauchemars l'effrayaient et il avait peur de finir dans un asile. Il avait peur d'être seul pour toujours.
Mais était-ce peut-être ce qui l'attendant en fin de compte.

Il regarda les deux à l'extérieur qui se battaient.
Le combat était presque terminé.
Le blond parut se rendre et l'autre suspendit son geste dans les airs, froidement; il allait lui briser les os d'un bras apparemment, ce qui ne manqua pas de faire reculer Dawson jusqu'au mur. Il avait un peu peur d'eux.
Ils se battaient avec insouciance, comme si c'était normal, voire un jeu, bien que le plus jeune ait comme peur de l'autre.

Quelque chose attrapa son poignet gauche.
C'était dur et froid et il regarda.
Une main de bois le tenait fermement.
Il ferma les yeux.

"Je suis en train d'halluciner!"

En effet.
Il n'y avait rien.
Mais même les yeux fermés, se répétant qu'il n'y avait rien d'autre qu'une hallucination, il senti cette main de bois tenant fermement son poignet, comme si la chose voulait l'empêcher de bouger.
Il ne faisait plus attention à la jeune femme en rouge.
Il tentait de se dégager du mur où il n'y avait rien.
Et puis il rouvrit les yeux et il n'y avait plus rien effectivement.

-J'aurais jamais dû lire ce livre, murmura t-il en jetant un regard légèrement craintif vers la couverture de "Démences".

Il ne s'en était pas rendu compte, mais une lueur de peur se lisait dans ses yeux.
Et ça ne venait pas de l'étrange trio.
Juste de ses propres hallucinations.