La fête foraine.
Je la déteste un peu plus chaque jour. Trop de monde. Trop de bruit. L'air est irrespirable à cause de la fumée qui sort des manèges, et de l'odeur des auto-tamponneuses qui se mélangent avec celles des donuts, des crêpes, et des barbes-à-papa. Je déteste les barbes-à-papa.
Je marche tout droit, au milieu de la foule, comme tous les soirs. Je me fraie difficilement un chemin dans la masse, je passe au milieu des manèges que j'ai tous déjà vu au moins cent fois. Les gens me bousculent, je fais de même. Ils ne me reconnaissent pas. Ils ne me respectent pas. Pas encore, mais je sais que le jour arrivera où ils ne me bousculeront plus, et s'ils le font, ils me demanderont pardon. Ici, je ne suis personne. Pour personne. Juste un gars de deux mètres de haut qui se cachent sous un trench-coat et un chapeau, les mains dans les poches, et qui marche la tête baissée, renfermé sur lui. Les gens ne m'adressent pas la parole. Et franchement, ça vaut mieux comme ça. Je n'ai plus rien à dire, à aucun d'entre eux, depuis très longtemps. Pourquoi est-ce que je perdrais mon temps à discuter avec des inconnus ? Ce n'est même pas la peine que j'essaye de faire connaissance. On ne veut pas me connaître. Ce n'est pas la peine que j'essaye d'impressionner. Je suis déjà impressionnant. Et ça, ça leur fait peur.
Toujours autant de moutons devant le Super Tornado. Je ne comprends même pas comment ils font pour ne pas avoir la gerbe, avec ce truc. Je me rappelle la fois où j'ai essayé. J'ai vomi mes tripes quand ça s'est arrêté. C'était pas cool. Ils... ces salauds se sont moqués de moi, une fois encore. A croire qu'ils avaient jamais vu un colosse tomber malade après un manège à sensations fortes. Les gros durs n'étaient pas malades. Surtout pas Killer Croc, l'homme qui tuait les crocodiles à mains nues. Voilà ce qu'ils pensent, ces abrutis. Les attractions de fête foraine font gerber, c'est comme ça. Ils pensent que survivre au Super Tornado fait d'eux des durs, ils pensent qu'ils n'ont peur de rien. Mais ce ne sont que des tarlouzes qui veulent épater la galerie. Ils se croient normaux, parce qu'ils sont comme tout le monde, et font comme tout le monde. Tous les mêmes. Et ils en sont si fiers... Je suis différent d'eux, je suis né différent, et je les emmerde.
Je déteste la fête foraine. Et je déteste ceux qui y vont. Même si c'est mon gagne-pain, à moi, et à la bande.
Tiens, en parlant d'épater la galerie... Ces petits merdeux croient être des durs à cuire parce qu'ils tapent sur un gant de boxe. Ils se sentent fort, avec cette machine qui mesure leur force quand le punching-ball se rabat. Conneries. Je vais leur montrer ce qu'est réellement la force.
PAF
"973 points ! Pas mal, mec !"
"A moi ! J'vais exploser ton score !"
PAF
"988. Bien joué, tu l'as battu !"
"Et encore, j'suis moins en forme que d'habitude."
Je vais ridiculiser ce vantard devant ses deux potes.
"Ah... Vous croyez taper fort, les gars ? Attendez un peu..."
PAF KLONG BAM BZZZZZZzzzzzzzz
Merde... J'ai cassé la machine. Le punching-ball s'est décroché tout seul, il s'est encastré dans la machine qui s'est pliée en deux et s'est mise à faire des étincelles. Boarf... Pas de ma faute s'ils installent de la camelote.
Tiens, les trois gaillards ont l'air étonné.
"Putain, c'te monstre !"
"Hm ?"
.............
"Incroyable !"
"Ce type est trop fort !"
"Jamais vu ça !"
Il m'a insulté... Je le chope par le col et je le soulève brusquement.
"Qu'est-ce que t'as dis ?! Hein ?! De quoi tu m'as traité, là ?!"
Je rage ! Je vais le tuer, ce petit con ! Cette sous-merde qui ose me rappeler ma condition inhumaine. Pour qui il se prend ?!
Dans ma fureur, mon chapeau tombe par terre, découvrant ainsi ma face hideuse qu'on m'a si souvent reprochée. Les deux autres crient et se barrent, ils n'ont pas le courage de m'affronter. Les gens autour de nous nous regardent quelques secondes sans interagir, parce qu'ils ont peur, puis ils se dépêchent de s'éloigner de là en faisant mine de nous ignorer. Ils ne veulent pas d'ennuis. Mes yeux menaçants fixent les siens. Il est terrorisé. Encore plus depuis que... Depuis que mon chapeau est tombé. Depuis qu'il a vu mon vrai visage. Il ne m'avait pas reconnu. Il ne m'a pas appelé "monstre" parce que j'en ai l'apparence. Il l'a fait à cause de ma force. Ce n'était pas une insulte. Je me suis emporté, et je ne comprends ma bêtise que trop tard. Après m'être énervé devant tout le monde, en pensant qu'il m'avait insulté alors que ce n'était pas le cas. J'ai honte. Je lâche le type, il tombe sur le cul. Ce couillon s'est pissé dessus, il tremble encore. Les gens autour me regardent sans s'attarder, me contournant en restant loin de moi, comme si j'avais la peste.
Je dois me calmer. Je ne retournerai jamais en prison. Trop de mauvais souvenirs. Trop douloureux. J'y ai déjà gâché dix-huit ans de ma vie. Je ramasse mon chapeau sans rien leur dire, puis je me tire. Ils ont vu mon vrai visage. Ma vraie personnalité. Ils ont compris mon complexe... J'ai honte. Honte d'être comme je suis. Honte à cause d'eux. Et maintenant, ils le savent. Ils m'ont vu m'énerver à cause de ça. Je préfère me cacher, et cacher ma honte.
Je continue jusqu'au fond de la fête foraine. La grande scène pour le grand spectacle qu'il y a presque tous les soirs depuis huit mois. Killer Croc, le tueur de crocodiles. En fait, ce sont des alligators, c'est ce qu'on m'a dit une fois, mais tout le monde s'en fout, personne ne fait la différence. Même moi, je la connais pas. Le spectacle commence dans une demi-heure. J'ai trente minutes pour me préparer. Je passe par la porte de derrière pour entrer dans ma loge, et je me change. Un slip de bain, c'est tout ce que je dois mettre. Ça ne me plait pas vraiment d'être obligé d'exposer ma maladie pour le spectacle. Il paraît que c'est pour attirer les gens. Ils viennent pour voir ma peau difforme et horrible, ou pour voir un homme survivre à un alligator ? Parfois, je me demande si je ne suis pas plus la bête de foire que les alligators contre lesquels je me bats. Mais, au moins, sur scène, les gens me respectent. Dans leurs gradins, ils ne m'insultent pas, ils ne me regardent pas bizarrement, ils ne me détestent pas et ne m'évitent pas.
Je sors de ma loge et je passe devant l'enclos à 'gators.
"Salut Croc ! La forme ce soir ?"
"Salut Pit'. Ouais, comme toujours. Tu l'as nourri ?"
"Je les ai tous nourris ! Aucun d'entre eux ne te bouffera ce soir, crois-moi ! On va pas te laisser te faire dévorer par ces sales bêtes, t'inquiètes pas, tu nous rapportes trop pour ça !"
Je me demande bien ce qu'il veut dire par là... Ils prévoient de se débarrasser de moi le jour où tout le monde sera lassé de mes spectacles ?... Faut que j'arrête, je deviens trop parano. Si ça continue, je vais me mettre à tuer tout le monde sans raison... Non, je ne retournerai pas en prison. Et puis, le seul gars que j'ai tué le méritait, de toutes façons. Ce petit con s'était moqué de moi, et ça m'a valu dix-huit ans. Enfant de putain... Je regrette pas qu'il soit mort. J'aimerais même le tuer une deuxième fois, parce qu'on peut dire qu'il m'a fait encore plus chier une fois mort que vivant.
"C'est pour elle que j'm'inquiète, pas pour moi."
Les gens commencent à remplir les gradins. Le spectacle va bientôt commencer. Les manèges s'arrêtent, la musique s'éteint, les lumières aussi. Puis, les lumières de la scène s'allument, éclairant le bassin. Je suis l'attraction principale de la fête foraine.
"Mesdames et messieurs ! Bienvenue pour ce 118éme Killer Croc Show ! Préparez-vous à assister au spectacle le plus terrifiant et le plus spectaculaire de toute la planète ! Devant vos yeux ébahis, ce soir, un seul homme sera confronté au plus terrible de tous les prédateurs aquatiques de tous les temps ! Mais avant toute chose, accueillons la belle, la radieuse et sulfureuse Isabella !"
Elle sort de l'eau, toujours aussi magnifique. Vêtue d'un simple bikini pour attirer plus d'hommes. Ça me rend jaloux. Elle nage merveilleusement bien, jusqu'à l'île au milieu du bassin, et elle sort de l'eau. Deux hommes déguisés en crocodile sortent de leur cachette, derrière un faux rocher, pour faire semblant de la capturer, et l'attachent à un faux arbre, comme tous les soirs depuis quelques semaines. Avant, il y avait pas tout ça. J'avais juste à me battre contre le gros reptile, dans une cage avec une petite marre, et puis c'était fini. Mais il a fallu qu'ils rajoutent toutes leurs conneries pour plaire au public, qu'ils rajoutent une histoire avec une princesse à sauver, tout est répété et orchestré à l'avance. Sauf mon combat. Bientôt, lui aussi ne sera plus improvisé, et il n'y aura plus d'intérêt à mon spectacle. Ça me dégoute. Je sais déjà ce qu'il va se passer. Maintenant qu'elle est attachée, le niveau de l'eau va monter rapidement jusqu'à ce qu'elle en ait jusqu'à la taille.
"Mon dieu ! Isabella s'est faite attachée par les hommes-crocodiles ! Ils la donnent en offrande à leur dieu et maître ! Oh ! Je le vois arriver ! Il mesure quatre mètres de long et pèse plus de trois cent kilogrammes, il est là depuis des millions d'année et a même survécu à l'extinction des dinosaures, voici Aliiiiiiiiiiiiiiiiiiiii l'alligator !!!"
Jamais compris pourquoi les gens applaudissaient un crocodile. C'est pas comme si ça lui faisait quelque chose. Ils veulent l'encourager pour qu'il bouffe la princesse ?
Depuis qu'elle fait partie du spectacle, les crocos sont encore mieux nourris pour éviter qu'ils s'attaquent à elle. Alors moi, je ne prends plus aucun risque. Mon spectacle est de plus en plus lassant.
Mais au moins, Marvin présente toujours le spectacle aussi bien.
"Oh non ! L'alligator traîne dangereusement autour de la belle Isabella ! Il semblerait que tout soit fini pour elle ! Elle va se faire manger ! Est-ce que Killer Croc va venir pour la sauver ?.... Je ne l'entends pas, à mon avis, il ne viendra pas sans encouragement !"
"Killer Croc ! Killer Croc ! Killer Croc ! Killer Croc !"
"Non, il n'entend toujours rien ! Vous devez l'appeler plus fort !"
"Killer Croc !!! Killer Croc !!! Killer Croc !!!"
"Mesdames et messieurs... Il mesure plus de deux mètres, et pèse plus d'une centaine de kilo de muscles ! Elevé par des alligators, il s'est battu contre eux toute sa vie ! Possédant une force surhumaine et la peau aussi résistante que les écailles d'un crocodile, il est, bien qu'il n'en ait pas l'air, le seul être humain à l'heure actuelle capable de les affronter à mains nues et de leur survivre ! Préparez-vous à acclamer le grand, le puissant, le seul et l'unique... Killeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeer CROOOOC !!!!!!"
C'est mon tour. J'entre en scène en courant et je plonge dans le bassin rapidement, sous l'acclamation de la foule. Ils m'acclament. Ils sont venus pour moi. Il n'y a vraiment qu'ici qu'ils me respectent. Je nage vers l'alligator, et mes bras s'enroulent autour de son corps. Il se débat pendant un moment, ça éclabousse beaucoup. Il me donne des coups de queue pour me déstabiliser. L'important, c'est de lui faire fermer sa mâchoire. Il n'aura plus la force de l'ouvrir. Et s'il me mord avant, je lui donne un coup sur le sommet du crâne pour le forcer à l'ouvrir. Je le connais par cœur, je fais ça tous les soirs. Je parviens à fermer sa mâchoire entre mes deux mains. Il se met à faire des tours sur lui-même dans l'eau pour essayer de me faire lâcher prise, mais je tiens bon. Lorsqu'il se calme un peu, et qu'on arrive près du bord, je le pousse hors du bassin pour le faire sortir de l'eau. Ça sera plus simple pour moi de l'affronter sur la terre ferme. Je lâche sa mâchoire inférieure mais je plaque sa mâchoire contre le sol en appuyant sur son museau avec mon autre main pour la bloquer. Puis je passe l'autre bras sous sa gorge, et je commence à l'étrangler en me mettant sur son dos. Il recommence à tourner sur lui-même, mais je ne le lâche pas. Je le serre assez fort... juste pour le rendre inconscient. Je n'ai pas le droit de le tuer. Et puis, ce n'est qu'un animal. Aucune raison de le tuer. Il n'est pas méchant, lui. Je le faisais avant, mais on a eu des problèmes avec la protection des animaux. L'amende nous a ruiné, et on a failli devoir fermer le spectacle. J'ai dû... les convaincre, de ne pas nous faire fermer le numéro. Encore quelques secondes, jusqu'à ce qu'il se calme et que je ne le sente plus bouger. C'est bon, je lâche ma prise. Il est encore en vie. Je me relève et je lève les poings, en signe de victoire. Ils m'applaudissent, m'acclament, crient mon nom. Maintenant, je dois aller sauver Isabella. Le niveau de l'eau diminue, je la détache, et Steve arrive au bon moment pour la prendre dans ses bras. Moi, je plonge en arrière et je quitte la scène. Je suis le sauveur, le guerrier. Pas le prince charmant. Un jour, le numéro s'appellera "Steve et Isabella contre les affreux hommes-crocodiles". Et tout le monde m'aura oublié.
Je retourne dans la loge pour me changer et je reviens à la dure réalité. Quand je sors, je la vois. Je tente ma chance.
"Hey Isabella, ça te dirait qu'on bouffe ensemble ?"
"Oh, non, désolée Croc, Steve m'a déjà invitée."
Ne t'excuses pas si tu ne le penses pas, pouffiasse.
"Bah, pas grave, on a qu'à le manger !"
"Heu... haha... Bon j'y vais salut !"
Je ne plaisantais qu'à moitié.
Elle a peur de moi, et je le sais. Ils ont tous peur de moi. Ils me prennent pour un monstre. Pour un crocodile. Comme si j'allais me mettre à manger des gens. Je ne suis pas un monstre.
Plus loin, j'entends un gamin parler à sa mère.
"Maman, est-ce que c'est vrai qu'il a la peau d'un crocodile ?"
"Non, voyons ! C'est juste un déguisement pour faire peur !"
"Comment il fait pour battre le crocodile ?"
"Oh, il ne le bat pas vraiment, tu sais ! C'est un spectacle, c'est truqué !"
Continue de croire ça, pouffiasse...
Les gens me dégoutent. Ils ne croient en rien. Sur la scène, je suis un héros. Mais tout est faux. C'est qu'un spectacle.
La réalité est beaucoup plus dure. Ici, je ne suis plus rien. Rien d'autre qu'un monstre.
J'en ai assez de ces gens, de ce monde. J'en ai assez de ne vivre qu'au travers d'un personnage qui n'existe pas. De rester bloqué ici, à rien faire, à attendre mon prochain faux spectacle que j'ai déjà fait cent fois. Je veux être libre. Je veux faire autre chose. J'ai de la force. Je peux m'en servir pour faire autre chose. Il faut que je me barre d'ici. Je vais voir le boss pour réclamer mon fric.
"Salut Richard."
"Tiens, salut Croc ! Pas trop crevé ce soir ? Qu'est-ce qui t'amène ?"
"Non. Je viens réclamer mon argent."
"Ton argent ? Ouais, il est là, je l'ai toujours gardé. Mais c'est bizarre, d'habitude tu t'achètes jamais rien, tu vas en faire quoi ?"
"Je me tire, Richard."
"Quoi ?! Mais ! Croc, t'es pas sérieux ! Pourquoi tu veux partir ? Ton spectacle marche du tonnerre !"
"J'en ai marre de faire toujours la même chose et de vivre ici, je veux aller ailleurs, faire autre chose."
"Et qu'est-ce que tu veux faire ?"
"J'en sais rien... D'la boxe, peut-être. J'ai un bon crochet du droit. Une bonne gauche."
"Ha ha ha ha !!! Sois sérieux ! Les boxeurs qui marchent bien ont des gueules qui passent bien à la télé. Enfin, te vexe pas, mais, qui va vouloir de toi, sérieusement ?"
"J'aime pas ce que tu insinues..."
Il commence à m'énerver.
"Croc, écoute... Quand t'es arrivé ici, tu n'avais rien. Pas de foyer, pas d'argent, tu crevais la dalle, tu puais le rat mort et personne ne voulait de toi. On t'a recueilli, on t'a logé, on t'a nourri, on t'a donné du boulot. T'as tout ce que tu veux ici. T'as même plus besoin de te cacher ! T'es prêt à abandonner tout ça ?"
"Ouais. C'est cool ce que vous avez fait pour moi, mais rien n'a changé. Dehors, c'est toujours la même chose. Les gens me détestent. Sur scène, ils font semblant de m'encourager, pour le spectacle, mais ça ne me fait plus rien. Je ne supporte plus la foire. Faut vraiment que je me barre, donne moi mon fric."
"Bon... Je ne peux pas t'obliger à rester, après tout. C'est bien dommage... J'espère au moins que tu finiras pas en taule. Gâche pas ta chance."
"T'inquiète. Dix-huit ans, ça m'a suffit."
"Bon, alors voilà... 300 dollars."
"Quoi ?! C'est tout ?! Pour avoir bossé 8 mois ?! Tu te fous de moi !!!"
"Hey ! Du calme ! Qu'est-ce que tu crois ? On est forain, ça coûte cher d'entretenir les manèges et on doit vivre nous aussi !"
"Pas en prenant mon argent ! De mon spectacle !"
"Ecoute Croc, ici, on partage tout. Et puis, tu n'es pas tout seul, il y a Isabella, Steve, Pit..."
"Mais ils foutent que dalle ! C'est moi qui prends tous les risques ! C'était mon spectacle !"
"Isabella aussi prends beaucoup de risques..."
"Tu parles ! Elle reste attachée et le croco ne l'attaque même pas tellement il est bourré de viande ! Fais la affronter le croco, on verra comment elle s'en sortira !"
Je casse la table sans m'en rendre compte en tapant dessus furieusement. Richard veut m'arnaquer. J'aime pas ça du tout.
"Hey Croc, calmos ! Si tu restes un peu plus longtemps, tu auras plus d'argent !"
Cette fois, c'est trop, je l'attrape à la gorge pour l'intimider.
"Donne moi mon fric !!! Tout de suite !!!"
"Je... t'ai donné... tout ce... qu'il restait..."
"Tu m'avais dis que tu gardais mon argent au cas où j'en aurais besoin !!!"
Je le jette au travers de la pièce. L'argent est quelque part dans sa caravane de forain pauvre et pitoyable. J'en suis sûr. Je retrouverai mon fric même si je dois tout saccager pour ça.
"Croc !!! Croc arrête ! Tu ne trouveras rien ! J'ai tout utilisé ! Tout ! Tu... Tu te souviens ce conflit avec la protection des animaux ?... Ca nous a ruiné !... On avait des dettes, j'ai dû les rembourser !"
"Avec MON argent ?!"
"Je... J'ai pensé... que c'est toi qui devait payer... tu.. tu n'utilisais jamais ton argent... et puis tu étais re-responsable..."
"On savait tous les deux que je les tuais ! T'étais d'accord ! Me r'mets pas ça sur le dos !!! Je reviendrai dans une semaine, Richard, et je veux mon argent ! Démerde toi !"
Sinon, je te tue, sale petit enfoiré de voleur.
Une semaine plus tard.
Je reviens pour récupérer mon argent. Évidemment, il n'a pas pu obtenir plus de cinq cent dollars supplémentaires. Je me fais arnaquer, je suis sûr que cette pute d'Isabella a gagné plus que moi. Je l'avais prévenu. Je n'aime pas qu'on m'arnaque. Je vais me venger, et ça va faire très mal. Ils vont tous payer pour s'être servi de moi.
...
Ça y est, je l'ai fait. Richard, éventré. Isabella, violée puis égorgée. Steve, nuque brisée. Pit', épargné. Le seul qui était cool. Et puis, il s'est fait arnaquer aussi. Il m'a fait pitié quand il s'est pissé dessus en me voyant couvert de sang. Tous les autres, massacrés. Je détestais la fête foraine, mais ce soir, il n'y en aura plus. Killer Croc, le tueur de crocodiles ? Non. Killer Croc : le crocodile tueur ! Ça fait du bien de s'être vengé... Et pourtant, j'ai l'impression que mon travail n'est pas terminé. Que ça ne fait que commencer. Il y a tellement de gens dont je dois me venger. Mon connard de père, ma putain de tante, ce gros porc de la maison de redressement aussi... Ils ont cru que je les oublierai... Jamais. Ces souvenirs resteront toujours. Tant que je les aurai pas fait souffrir autant que j'ai souffert.
Vivre honnêtement ? J'ai essayé. J'ai vraiment essayé. Mais c'est impossible. Les humains, qui se croient si biens, si beaux, si bons, ne veulent pas de moi à leur côté. Puisque j'ai cette force, ce pouvoir, autant que je l'utilise pour moi, plutôt que pour les autres. Je peux me faire une place dans la criminalité. Une belle place. On me respectera. On m'obéira. Je serai craint, pas pour mon apparence, mais pour ce que j'aurais fait ! Je vais trouver la ville la plus malhonnête de toute l'Amérique. Et je vais y devenir son plus grand criminel !