Le ciel s'assombrissait à Gotham. Un barrage tenu par quelques militaires empêchait l'évasion des détenus mais permettait à d'autres d'entrer dans ce fameux quartier. New Gotham, un nom qui devrait signifier une renaissance mais même ce nom semblait être un paradoxe par rapport à la réalité.
Une voiture noire aux vitres teintées s'arrêta devant le barrage. Deux hommes de main étaient au volant. Ils s'arrêtèrent tranquillement et baissèrent leur vitre à la vue du soldat qui s'approchait.
" Bonsoir messieurs. Qui êtes-vous et que comptez-vous faire à New Gotham ? "
L'homme de main s'apprêta à répondre quand la vitre arrière se baisse pour que le soldat puisse entrevoir le visage de Julien Morgan.

" Vous n'êtes pas qualifié pour les explications chauffeur. Je viens ici en vue d'une collaboration avec le maire et pour inspecter certains quartiers. Je m'appelle Julien Morgan et si vous avez des doutes sur mon identité. Appelez au bureau de Green World Corporation à ce numéro. "
Le millionnaire frenchy avait débité tout ça d'une voix calme et avec une parfaite élocution. Une voix monotone faisant penser à quelqu'un qui tente de vous hypnotiser. Il avait tendu une carte au soldat avec le numéro.
" C'est bon, tu peux les laisser passer ! "

La barrière se leva et la voiture s'avança dans les rues de New Gotham. La voiture s'arrêta devant l'enseigne du Thé de Fous où l'attendait son client. Il sortit de la voiture suivi de ses porte-flingues qui avaient dissimulé les armes sous la banquette arrière. Il s'avança vers la porte et frappa quatre fois.

Un gorille vint ouvrir la porte à Julien Morgan et ses hommes de mains. Ils entrèrent dans un salon décoré de peluches et de marionnettes. La salle était obscure et éclairée à la bougie. Le client était assis à une table, une chaise demeurait vide en face de lui.

- "Vous êtes en retard, mes chers amis des Contes. Pourriez vous me donner une bonne raison pour que la Reine de Coeur et moi-même nous vous acceptions à cette tablée des plus folles ? Avez vous des cadeaux ? J'aime les cadeaux."
Julien Morgan s'avança vers la table et dit ces quelques mots.
- Je viens effectivement avec des cadeaux à un détail près.
Il claqua des doigts et un homme de main posa sur la table une petite mallette noire contenant armes de poings, grenades, munitions et dispositifs de surveillance.
- Je vous offre tout ça si vous avez quelque-chose pour moi. De l'argent, un service, un jouet destructeur ? Je vous laisse choisir.

- "Vous ne l'avez pas appelé j'espère ?"
- Non, je ne l'ai pas appelé. Qu'est-ce que j'y gagnerais ?
La voix du Chapelier était chantante et enfantine alors que celle de Julien Morgan dénotait ce calme extraordinaire. On pourrait croire qu'il est inconscient face à un tel criminel mais ce n'est pas le cas. Il savait à qui il avait affaire.

- "De l'argent, il y'en a trop, cela dit je peux vous offrir ceci. Le carnet des numéros et adresses de tous les grands criminels de Gotham. Black Mask, Joker, Double Face, Poison Ivy, je suis certain que ce carnet si précieux pour vous, et si banal pour moi peut être la clé de vos rêves inassouvis mon cher. Voulez vous un peu de thé ? C'est ma spécialité."
- Vous avez de l'Earl Grey ? Sinon je me contenterais de ce que vous avez. J'ai toujours eu un faible pour les bons thés.

Julien Morgan voulait absolument ce carnet qui signifierait joindre le plus de clients potentiels et se faire un nom dans la pègre.
- "Je peux vous proposer de l'argent contre vos armes, ou bien le carnet d'adresses. Qu'est ce qui vous attirera mon cher ? Une entrée gratuite dans le monde de l'élite Arkhamienne ? Ou bien de l'argent banal, presque si inutile quand on en a trop."
- Je prends le carnet et je vous laisse plusieurs de mes petites mallettes chargées d'armes.

- "Le Batman est présent, partout, il peut même avoir mis un mouchard sur votre voiture, il est toujours là, dans le noir à épier comme une sale bête ..."
- Si Batman pose des micros dans ma voiture, il n'apprendra pas grand-chose et mettre un mouchard ne l'aiderait pas plus même s'il me soupçonnerait. Il n'aura aucune preuve contre un homme d'affaires passant pour un écologiste convaincu. Je suis l'image même de la banalité et on ne soupçonne jamais un parfait innocent.

Les hommes de mains avaient posé cinq mallettes contenant de l'armement militaire. Il y avait de tous : Armes de poings, Mitraillettes pliables, grenades, dispositifs de détection et de pistage, explosifs.

- "Méfiez vous cher ami ... Même avec un habile déguisement et une campagne solide, il a réussi a voir que j'étais le maire de Gotham, le soir même de mon élection. Imaginez ma surprise."
Julien Morgan ne connaissait pas trop l'histoire du fameux chapelier. Il avait essayé d'être maire ? Les maires intègres semblaient manquer dans cette ville depuis un moment.

- "Je vous offre donc le carnet. De nombreuses adresses de criminels et de personnes dirons nous "louches" dans ces affaires. Mais ne vous inquiétez pas. On a toujours besoin de passer des affaires, et même le criminel le plus fou en a besoin, prenez quand même un gilet pare-balles, on ne sait jamais."
- Merci beaucoup, j'espère que vous aurez apprécié amplement mes services. N'hésitez pas à me contacter si vous avez besoin d'autre chose.

- "J'ai une idée saugrenue ... Pourriez vous m'approvisionner en ... Jeunes filles blondes ? De sept à quatorze ans serait parfait."
Quoi ? C'est quoi cette demande ? J'ai déjà trempé mes mains dans le proxénétisme à Paris mais là ça devient bizarre.
Julien sourit et reprit la parole.
- Vous pouvez imaginer qu'une telle chose n'est pas aisée mais qu'en y mettant les moyens. On pourrait arriver à un compromis.
Le trafiquant se retourna et fit signe à un de ces hommes de main, un blondinet à lunettes, de s'approcher.
- Je vous présente Arnold Jones, c'est un mercenaire et un assassin qui travaille pour moi. Il est passé maître dans l'art de l'enlèvement. Il a également une passion pour les scalpels. Son costume en est truffé. Je veux bien le payer pour vous faire ce genre de cadeaux mais je veux votre confiance. Vous aurez vos jeunes filles et tout ce que je vous demande en échange est votre silence quand à mon nom.

Julien Morgan souhaitait garder l'anonymat et c'était pour ça qu'il tenait à avoir un allié comme le Chapelier. Il est fou et il gardera le silence s'il a ce qu'il veut.

Tetch posa quelques liasses de billets verts sur la table. Julien Morgan était satisfait de ce marché.

- "Du bon travail. La Reine de Cœur sera ravi de votre travail. J'ai grand hâte de vous présenter au cercle criminel. Peut être que nous vous inviterons au carré VIP de l'Iceberg Lounge, avec le Pingouin. J'en suis sur, nous ferons du bon travail."
- Mais ce n'est rien. On se doit d'être bon en affaires si l'on veut se faire respecter. J'ai entendu beaucoup d'histoires sur cette ville dans mon pays mais je suis agréablement surpris que ce ne soit pas des fables. Alors, je suis certain que nous ferons un excellent travail. "

- "Mes amitiés à votre femme, cher ami. Et n'oubliez pas, les gens tuent, pas les chapeaux."
- Je n'oublierais pas vos bons conseils. Vous êtes ce qu'on peux appeler un modèle pour notre chère société.

Julien Morgan avait eu une femme il y a bien longtemps. Il aurait peut-être eu une vie normale si elle n'était pas morte dans cet accident de voiture.
Je ne t'oublierais jamais Laure. C'est pour toi que j'essaie de survivre en me maintenant au dessus des autres. Adieu Laure.
Ces mots, toujours ces mêmes mots, que l'on prononce une dernière fois sur la stèle grise de l'être bien-aimé.

L'homme d'affaires rusé et cultivé reprit le dessus.

- Je voulais vous poser une dernière question avant de partir. Connaissez-vous la différence entre un corbeau et un bureau ?
Julien Morgan lâchait cette phrase à un criminel qui se prenait pour le fameux Chapelier Fou du conte de Lewis Caroll. Tetch ne pouvait que reconnaître cette énigme.

Julien Morgan avait été surpris par l'apparition de la mystérieuse jeune femme.
-Il n'y en a aucune, Car Edgar Allan Poe écrivait sur les deux. Fort heureusement il est toujours l'heure pour la culture.

L'homme d'affaires jaugea la jeune femme du regard. Elle faisait alors partie de la bande de tarés sortant directement du conte Lewis Caroll. Il ne pût s'empêcher de sourire en la regardant examiner les armes.

- "White Rabbit, ma complice dans le Crime. Ne vous sentez pas effrayé, monsieur Morgan. Nous oublierons votre nom et le petit Peuple du Pays des Merveilles gardera une trace impérissable de votre passage. Vous êtes un architecte dans le Gotham de demain, et je suis sur, que nous nous reverrons."

Malgré l'impression qu'elle donnait en examinant les armes, elle réussit a montrer que ces armes étaient d'excellentes factures. Cette analyse lui rappelait la fois où il a vendu des armes sans gâchettes à ses ennemis de la pègre parisienne.

- "Nous vous appellerons Monsieur Personne. Tel Ulysse dans son Odyssée, vous ne serez Personne et Personne n'aura jamais de soucis si notre Clan d'Arkham venait a être démantelé par le GCPD. Sachez que votre travail et votre rigueur seront un plus pour notre réseau de criminels."
- Ce surnom me convient parfaitement mais ne vous en faites pas. Si vous veniez à tomber, je pourrais avancer mes pions pour amortir votre chute. Vous aider jusqu'à ce que l'on entende les mots fatidiques.
Echec et mat...

- "Si nous pouvons faire quelque chose pour vous, le Gang des Merveilles répondra Présent."
- Merci. Il se trouve que certains parasites me gênent dans cette ville. Si vous tombiez sur eux, je vous saurais gré de m'en débarrasser.

Un homme de main avait tendu son téléphone portable sur la table. On y voyait le visage de Franck Morand et de cette mystérieuse Miss Nazo japonaise.

- "Méfiez vous cependant de la Ligue des Ombres, ce sont des ordures, et comme tous les métèques de leur société, ils vous poignarderont dans le dos."
- Je ferais attention à cette Ligue des Ombres. Vous pouvez me faire confiance.

- "Choisissez bien vos amis, et vos ennemis. Même si l'affaire semble juteuse, il y'a toujours un double tranchant. Avec moi ... Aucun risque."
- Ne vous en faites pas pour moi. Celui qui m'a donné un coup de bâton s'en est toujours pris deux en retour. Je ne suis pas un idiot. Quand on ne sait pas se battre, on a intérêt d'avoir de la matière grise.

Julien Morgan était un personnage intrigant déchiré entre une enfance difficile refoulée et un code social qu'il respectait toujours. Il ne montait jamais la voix et n'était jamais vulgaire dans son langage. Sa folie ne ressortait que par son regard.

- Je vais devoir vous laisser mais n'hésitez pas à me contacter si vous avez besoin de mes services. Voici ma carte.

Un homme de main laissa la carte du trafiquant d'armes sur la table.

- Arnold vous amènera de la visite de temps en temps.

Julien faisait bien sûr allusion au jeunes filles que l'homme de main allait kidnapper pour le Chapelier.