Franck Morand était dans sa cellule, cet endroit était rempli de poussière. Six gardes allèrent le voir. L'un des hommes frappa à la vitre de sa cellule pour attirer son attention. Le Cannibale était allongé sur son lit si on peut appeler ça un lit. Il passait son temps à faire des mots croisés. Dès qu'il entendit le coup à la vitre, le patient posa son cahier de mots croisés par terre et fit semblant de ne pas entendre le garde. Le garde n'était pas très patient et s'énerva.

-Levez-vous, vous avez rendez-vous avec le docteur !

Le patient se leva de son lit, il n'aimait pas qu'on le dérange. Le peu de chair que le garde exhibait sous son casque semblait grasse, trop grasse pour lui. Il devait faire un régime. Les gardes entrèrent dans la cellule et s'approchèrent avec prudence. Certains étaient stagiaires et suaient comme pas possible. Franck ne voulais pas leur compliquer la tâche, pas aujourd'hui. Il ne fit aucune résistance ni remarque au gardes qui lui mirent une camisole et vérifièrent si il était bien attaché. Ils sortirent de la cellule et se mirent sur la route. Les six gardes encadraient Franck a tel point qu'il n'avait aucune marge de manœuvre pour se déplacer. Il était totalement guidé. Franck se demanda qui était ce docteur, ce qu'il voulait savoir sur lui. Le cannibale n'avait pas mangé quelqu'un depuis deux mois. Il réfléchit à un moyen de quitter l'asile mais n'en trouva aucun. Peut-être que lors de son entretien, il trouverait un moyen. Un morceau de verre qui traîne où mieux encore, un plan. Ils arrivèrent devant la salle où il allait rencontrer ce fameux docteur. Ils patientèrent quelques minutes, avant qu'il n'entende le docteur l'appeler.

- "Faites le entrer ..."

Le Cannibale entra dans la salle accompagné de seulement trois gardes, les trois autres étaient partis se reposer. Il marcha très lentement vers le docteur Jeremiah Arkham en regardant par terre. Un sourire se fit sur ses lèvre. Pour lui, avoir une conversation avec quelqu'un était réjouissant. Il attendait cet instant avec impatience. il s'arrêta et leva sa tête. Les gardes le posèrent sur une chaise en face du bureau du psychiatre. Il regarda le docteur droit dans les yeux et lui dit ces quelques mots, avec un sourire narquois aux lèvres.

- Bonsoir docteur.

Le Cannibale était prêt à écouter les remarques du docteur. Cet homme n'était pas très impressionnant, ce n'était que pour lui un imbécile, et un trouillard. Il l'avait enchaîné, avec des chaînes qui lui semblaient démesurées pour un être humain. Cela ne servait à pas grand-chose a part rassurer le docteur. De plus, il n'avait pas l'air très appétissant. Morand était devenu très pointilleux sur son alimentation et prenait soin de sa ligne.

-"Monsieur Morand c'est ça ? J'espère que vous appréciez notre hospitalité à Arkham. Mais ne croyez pas m'impressionner avec votre pathologie, j'ai vu des choses encore pires que vous ne pouvez l'imaginer."

Le Cannibale ne réagit pas aux paroles du psychiatre. Il savait que c'était la seule personne ayant le pouvoir de le laisser partir d'Arkham. Ensuite, le docteur posa une question à Franck.

-"Parlez moi du soir où vous avez dévoré vos enfants."

Il fronça les sourcils, car il n'aimait pas qu'on lui parle du passé. Mais il se reprit et commença à raconter son histoire pensant que son honnêteté serait un plus pour sa libération.

-C'était un soir d'hiver, ma femme n'était pas encore rentrée. Mes enfants jouaient dans leur chambre. Moi, j'étais dans la cuisine. je préparais un dîner pour ma femme et moi. J’appelle mes gosses pour qu'ils me rejoigne. Je l'ai ai ensuite coupé en morceaux et j'ai concocté un plat pour moi et ma chérie. Quand ma femme rentra, je lui fit croire que les enfants étaient gardés par des amis. Je lui servit mon plat et elle le mangea. Elle ne laissa aucune miette. Plusieurs jours plus tard, elle apprit qu'elle avait mangé ses propres enfants avec moi. Elle eut tellement de mal à digérer cette nouvelle qu'elle se donna la mort.

Le visage du criminel se fixait sur le sol. Il versa une larme. Puis il posa une question au docteur.

-Vous me prenez pour un simple tueur, mais vous aussi vous brisez les gens tout comme moi. Certes, vous les tuez par la parole mais ils ne sont pas moins morts pour autant. Alors, je me demande qui de nous deux devrait être le plus coupable ?

-"Je fais mon travail, et vous êtes mon patient. Revenons à vos enfants, croyez vous qu'ils aient apprécié que leur père, leur modèle, leur héros, les tuent et les dévorent en compagnie de sa femme ? Que ressentiriez vous si les consciences de vos enfants résonnent dans votre âme ? Des gens que vous avez trahi, brisé, et tué d'une mort si infâme …"

Le Cannibale écouta les paroles du docteur et observa son bureau. Il y avait une Bible sur celui-ci. Son docteur était donc chrétien. Il eut une idée à ce moment-là. Mais Jeremiah continua de parler.

-"Imaginez ... Vos enfants viennent vous voir, ils vous embrassent, vous disent que vous êtes le meilleur père qu'ils aient eu ... Et vous, vous les tuez et les découpez en morceaux. Que ressentiriez vous ? Colère ? Peur ? Rancune ? Entendez vous les voix, Franck ? Vos enfants qui appellent à l'aide ? Ou préférez vous le bruit de la cocotte minute ?"

Franck réfléchit à ce qu'il pourrait dire. Les trois gardes étaient fatigués de leur longue journée. Ils n’arrêtaient pas de transpirer. Le patient commença à répondre aux questions du docteur, sous un ton monotone.

- Quand j'ai mangé mes enfants, j'ai senti comme une libération. Comme si leur mort pouvait les sauver de la misère permanente. Leur mort était hélas nécessaire pour donner l'éternité à ma bien-aimée. J'ai peut-être découpé et tranché leurs corps mais leurs âmes sont en moi. Je leur ai offert la vie éternelle tout en me disant que c'était à moi de leur offrir cet avenir. Ma femme ne l'a jamais compris, elle n'a jamais compris que je la voulais immortelle. C'est pour cela qu'elle mit fin à ses jours. Je vais vous poser une question docteur. Croyez-vous en Dieu ? Croyez-vous qu'une âme même malade peut être sauvée ? Peut-on effacer l'ardoise définitivement ?

- "Dieu est toujours la, il n'est que miséricorde. Si vous vous tournez vers lui, il vous acceptera. Il faudra que vous vous repentiez pendant très longtemps."

Le Cannibale était déçu des paroles du docteur. Il croyait qu'il allait parler de choses plus intéressantes comme une réinsertion dans Gotham City, mais non. Le psychiatre reprit la parole.

- "Nous avons crée un dispositif de reconversion dans New Gotham, pour les patients. Cela vous tenterait de vous racheter de cette manière ? D'avoir une nouvelle chance ? Bien sur, vous serez surveillé, mais si le rapport est bon, vous pourrez être libre, et même recommencer une vie, sous réserve bien sur, de vos propres résultats."

Le plan de Franck avait marché, une reconversion dans New Gotham. Il attendait ça depuis le début. Pouvoir se déplacer avec aucunes chaînes aux pieds le réjouissait, même s'il serait surveillé comme l'avait dit le docteur. Il sut qu'il faudrait être patient avant d'être libéré complètement. Mais il était impatient de sortir de l'asile, cet endroit allait le rendre fou. Il le sentait.

- "Dieu vous jugera en fonction de votre allégeance à Dieu ... Si vous préférez le Diable, vous serez banni."

- Je vais me tourner vers Dieu pour pouvoir me racheter. Faites-moi confiance, les résultats seront bons.